Nach Genre filtern
L’histoire nous le dira mais, sans la pandémie de coronavirus, aurait-on réalisé l’importance du transport international ? L’absence de déplacements et l’essor du commerce sur internet ne nous auront jamais autant concernés. Aujourd’hui, nos paquets sont déposés devant notre porte. Avant cette maladie mondiale, qui aurait prédit une telle remise en cause des géographies et monopoles industriels ? Nerf de la guerre, qu’il soit en mer, dans le ciel, le cosmos, sur la route ou les chemins de fer, le transport – de personnes et de marchandises – est un secteur d’une richesse incroyable où l’on rencontre des acteurs passionnés. Venez les découvrir en écoutant la Chronique transports de Marina Mielczarek.
- 161 - Manager comme un pilote de ligne
« Un bon vol, c'est un vol sans histoire !» ou encore : « Quand il y a le feu aux réacteurs, il n'y a pas le feu !» Voilà les petites phrases que se répètent les pilotes de ligne. Savoir gérer le stress et éviter les risques. Dans son livre Manager comme un pilote aux éditions De Boeck, l'auteure Célina Roquet fait le parallèle entre deux mondes, l'avion et l'entreprise.
RFI : Votre livre nous fait découvrir les coulisses du décollage. Notamment la répétition obligatoire juste avant le décollage...
Célina Roquet : Oui. C'est une procédure qui permet une concentration maximale de l'ensemble de l'équipage. Un principe qui rappelle les données du vol et les informations sur les gestes à suivre. Le vocabulaire est codifié, réduit au minimum. C'est ce qui permet d'éviter les confusions. Chaque membre de l'équipage sait ce qu'il a à faire.
Vous expliquez que cela repose sur un principe humain : les deux mémoires. Mémoire de court terme et celle de long terme.
Parfaitement. Pouvoir se concentrer sur une tâche répétitive, mais délicate, et en même temps, connaître sa position et savoir ce qu'il restera à faire pour atteindre ses objectifs. Ce principe-là, lié à l'aviation, est très inspirant pour le monde de l'entreprise.
Vous en faites d'ailleurs un mantra : un bon patron est un bon pilote. Il doit savoir gérer le stress et les risques.
Le stress est nécessaire pour pouvoir agir. Mais quand il y a trop de stress à bord ou dans n'importe quel milieu, il empêche de prendre les bonnes décisions, sereines et prudentes.
Dans votre livre, vous donnez des exemples d'accidents d'avions qui se sont produits à cause d'une incompréhension entre le pilote et le reste de l'équipage...
Oui. En analysant les causes de plusieurs catastrophes aériennes, on a pu améliorer les méthodes et établir un vocabulaire commun et des procédures codifiées permettant d'agir vite et bien.
Pour vous, le pilote de ligne agit en cas de vent, de tempête... mais on dit aussi qu'un bon patron d'entreprise sait prendre des risques, c'est paradoxal, non ?
Pas du tout. En décollant, le pilote prend déjà un risque.
Pourquoi avoir choisi l'exemple du pilote de ligne et non pas le conducteur de train, par exemple, qui est également confronté aux risques ?
Vous, comme moi, ou n'importe quel passager d'avion, a déjà vécu cette situation. Dès son entrée dans un avion, on se dit qu'une fois en l'air, c'est fini, on ne peut plus sortir pour sortir sur la terre ferme en cas de problèmes. Dans un avion en hauteur, on doit rester à bord.
L'une des autres qualités à rapprocher du monde de l'entreprise est la capacité à anticiper, là encore, dont devrait s'inspirer et s'enrichir beaucoup de patrons ou de créateurs d'entreprises pour éviter les catastrophes...
Oh que oui ! Pour résumer, je dirais qu'avec ses équipes, il faut deux choses : un, être aligné sur les objectifs à atteindre et deux, avoir un plan B.
Donc préparer, savoir anticiper.
C'est ce que fait un équipage. En cas de turbulence, de difficultés ou d'accidents, ils savent ce qu'ils feraient. Même si cela n'arrive pas, être en capacité de réagir. Dans une entreprise, imaginez les réponses à donner en cas d'entretiens avec des clients difficiles, est une carte trop souvent négligée. Pourtant, dans le jeu de négociations, cette carte s'avère gagnante.
Sat, 27 Apr 2024 - 160 - BIM, le jumeau numérique
Le BIM, trois lettres qui révolutionnent le monde de la construction et des transports. B.I.M comme Building Innovating Managing, appelé en français « la technique du jumeau numérique ». Grâce à cette imagerie d'ordinateur, les transports, les ponts, les routes, les chemins de fer peuvent apparaître en situation de vie réelle. Paris vient d'accueillir un colloque international sur le sujet. Bien plus sophistiqués que la 3D, les jumeaux numériques permettent de réparer et de prévenir les erreurs.
La différence avec une photo ou une image en trois dimensions, c’est que le jumeau numérique est une image augmentée, permettant de voir l'entrepôt, le rail ou le pont dans sa vie de tous les jours. Prenez, par exemple, une route, un tunnel, une piste d’aéroport, une voie ferrée. Leur jumeau numérique vous donnera son image en temps réel avec toutes les données qui l’entourent. Qualité du sol, tremblement de terre, canicule et calculs des coûts, température, masses d’air, etc. Mais également les sommes estimées des montants de réparation ou de protection. Le jumeau numérique permet d'animer tout objet dans son milieu et de le faire évoluer en situation. Le plus spectaculaire étant de le voir en face d’imprévus : tremblement de terre, tempête de neige, canicule…
Foi de participants au colloque BIM World – qui s'est déroulé à Paris les 3 et 4 avril derniers – les conférences ont été de très haut niveau. Construction d'entrepôts, chaînes de stockage, routes de distribution, entrepôts et connexions aux centres-villes, le transport était au cœur des discussions.
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« Sur le BIM, les USA et le Canada sont en avance sur l'Europe »
Hanane Ferrat, spécialiste des jumeaux numériques pour l'entreprise Sweco à Bruxelles, estime que l'Europe gagnerait à développer ce genre de techniques, beaucoup plus utilisées aux États-Unis ou au Canada. Cette experte en infrastructures a fait son petit effet en présentant cette technique qui, comme elle le dit, n’est pas seulement utile, mais aujourd’hui fondamentale :
«L'imagerie du BIM est une imagerie intelligente. Les images des jumeaux numériques ont l'avantage de reproduire des objets existants ou bien dessinés sur plan ou bien en cours de construction. Toutes ces étapes, lorsqu'elles peuvent être vues en temps réel, font éviter les erreurs. Les images animées peuvent corriger et protéger des événements qui entourent le bâtiment ou l'infrastructure. Combien d'entrepôts ou de voies ferrées ont dû être démontées suite à des intempéries ou à un environnement imprévu lors de sa mise en place ?», explique la jeune femme.
Beaucoup d’entrepreneurs ne connaissent pas ou méconnaissent cette solution qui pourtant, peut leur faire gagner du temps, de l’argent et vice-versa ! À l’avenir, les experts du jumeau numérique, du BIM comme Building Innovating Managing ou « Construire, Innover, Gérer » en français, cherchent à faire découvrir les atouts du jumeau numérique au monde de l'entreprise, aux écoles d'ingénieurs et au grand public en général.
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Sat, 20 Apr 2024 - 159 - L'Hackathon européen, un concours pour inventer le transport de demain
Trois jours pour réinventer le transport. Cette semaine, à Paris, s'est tenue la 3e édition de l'Hackathon européen. Réunis à l'université française Gustave Eiffel, les étudiants de douze universités du continent (Portugal, Allemagne, Italie, Roumanie et bien d'autres), ont dû proposer de nouvelles idées pour le transport. L'ancienne maire de Strasbourg, aujourd'hui députée européenne, Fabienne Keller, faisait partie du jury et s'est confiée au micro de RFI à la sortie de la délibération.
RFI : En quelques mots, l'Hackathon européen, qu'est-ce que c'est ?
Fabienne Keller : Cette année, il s'agissait de la 3ᵉ édition. Pendant trois jours, les étudiants de filières liées au transport et travaillant dans les Universités partenaires de l'Université française Gustave Eiffel, concourent autour du transport de demain.
Les résultats des lauréats 2024 ?
Les rames du vivre ensemble ! C'est l'un des premiers prix. Cette idée toute simple et pourtant si innovante : transformer des rames de train, de tramway, de transport public en lieu de vie. Les passagers n'auraient plus qu'à choisir où ils préfèrent monter.
C'est-à-dire ?
Par exemple, de rames du fun ! De la joie, des chants, des jeux. Les passagers deviendraient les candidats le temps de leur trajet. L'autre option, dans le même train, vous auriez des rames du silence et du calme avec des coins lecture apaisantes. Ce concept réunit la surprise et l'inconnu (puisque vous êtes avec des partenaires et des adversaires de jeux dépendant de vos moments de transports) à la rencontre et l'envie de connaître vos voisins passagers. Je trouve l'idée géniale !
Quoi d'autre ?
Des routes en plastique ! Sur le principe de matières plastiques qu'on a parfois beaucoup de mal à trier et à recycler, les étudiants ont inventé un nouveau revêtement de routes. Alors, il s'agirait uniquement de pistes pour les vélos ou de véhicules cargos cyclables. Ce genre de revêtement recyclé est trop fragile, il ne supporte pas les gros poids comme les voitures ou les camions. Mais c'est une vraie bonne idée écologique !
Mais au final, à quoi bon ? Puisque cet Hackathon européen, organisé par l'Université française Gustave Eiffel et l'AFIT (Agence de Financement des Infrastructures de Transport de France) ne donne aucun budget pour les idées sélectionnées.
Mais ce n'est pas le but ! Effectivement, vous êtes en droit de demander l'utilité si on ne finance pas derrière. Mais cette compétition est une compétition d'idées ! Dans le monde utilitariste dans lequel nous vivons, cela compte beaucoup. De plus, les jeunes adorent puisqu'ils doivent avoir des idées novatrices, mais pas farfelues puisqu'ils sont entourés de spécialistes. On ne peut pas proposer n'importe quoi, d'irréalisable. Je perçois les aspirations de la jeunesse à travers leurs propositions.
Le jury, c'est vrai, est composé d'experts du transport et de l'environnement. L'écologie, la protection de la nature est un sujet qui les préoccupe.
Oui ! D'où la demande pour le retour aux trains de nuit ! La jeunesse européenne les revendique ! Je connais beaucoup de jeunes européens qui refusent l'avion aujourd'hui.
Pourtant, le train de nuit a du mal à revenir ! Les rails existent partout en Europe. Mais ce mode de transport est moins rentable que les TGV (Trains à Grande Vitesse). Malgré les promesses, les gouvernements ne sont pas encore décidés à rouvrir toutes les lignes de nuit qui ont existé par le passé, non ?
Vous êtes injuste ! Il y a eu ces dernières années des réouvertures de lignes. Je pense beaucoup à pays modèle, l'Autriche qui n'a jamais de financer ses trajets de nuits et c'est un succès ! Mais prenez l'Espagne, l'Allemagne et la France. Tout n'est que volonté politique ! Il reste des progrès à faire, mais depuis deux ans, il y a eu de nouvelles lignes proposées et c'est un grand progrès. J'espère que les élections européennes qui approchent donneront l'occasion de propositions et de débats sur le sujet.
Revenons à l'Hackathon, en tant que membre du jury, vous soulignez le rôle des experts européens du transport dans cette compétition.
Grâce à eux, les étudiants qui ne connaissent pas au matin du concours ont l'occasion de poser leurs questions, de voir si leurs projets seraient valables et réalisables. Ces conseils, ces connaissances et cette énergie constituent un merveilleux laboratoire d'idées C'est l'enjeu et le mérite de l'Hackathon !
Lien utile :
https://www.univ-gustave-eiffel.fr/international/hackathon-europeen
À écouter aussiChronique transports : la montée en gamme des trains de nuit
Sat, 30 Mar 2024 - 158 - Le transport intelligent au cœur de la troisième édition du CELO
Le CELO s'ouvre mardi à Deauville, en Normandie. Un salon entièrement dédié au transport de marchandises. Face au succès de l’année dernière, France Burnand, créatrice et présidente de ce salon, renouvelle le rendez-vous. Pour cela, les professionnels, transporteurs ou gestionnaires d’entrepôts, ont déjà choisi les sujets à débattre. Parmi les nouveautés de 2024, le stockage et l’intelligence artificelle.
RFI : Le CELO, votre salon est original. Les participants eux-mêmes choisissent les thèmes des débats de cette édition 2024. Le stockage est en tête, pourquoi ?
France Burnand :Bien vous savez, la guerre en Ukraine, le Covid, les attaques de navires en mer Rouge... Les quatre dernières années ont montré l’importance du transport. Mais surtout de la bonne gestion du transport. Savoir anticiper les stocks entreposés lorsque tout ou une partie de la chaîne s’arrête devient la règle numéro 1.
Quand on parle de problèmes de stockage, on parle de marchandises accumulées, mais encore ?
Oui, les commandes déjà effectuées et mises en entrepôts. Mais également la façon de les charger. Quel type de véhicules ? Quelles routes ? Or, lorsqu’un conflit éclate ou qu’une pandémie survient, il faut savoir anticiper l’acheminement, voire même prévoir les arrêts des commandes de consommateurs.
Le commerce en ligne s’est fortement accéléré avec la crise Covid débutée en 2020. On se rend compte que le transport touche le consommateur au plus près avec son colis livré à domicile !
C’est parfaitement cela ! Sans oublier un sujet de plus en plus évoqué par les transporteurs : le retour des colis ! Y compris lorsque l’on reçoit chez soi un énorme carton pour juste la livraison d’une brosse à dents à l’intérieur !
L’amélioration du suivi personnalisé, en temps réel, fait partie des préoccupations de 2024. Que vont changer les nouveaux outils d’intelligence artificielle dans la livraison ?
C’est un travail d’équipe ! Transporteur, gestionnaire d’entrepôts ou consommateurs font partie d’une même chaîne. Ils vont recevoir les données sur leurs colis et les conditions de son transport. Ils connaissent les méfaits de la pollution sur la santé. Ils doivent être exigeants sur les économies d’énergie et les effets du transport sur l’environnement.
Vous voulez dire que l’IA (Intelligence artificielle) va rendre le transport de colis plus démocratique ?
Oui ! C’est une évidence et c’est une demande des clients. Désormais, vous comme moi, si nous achetons un produit sur internet et que nous apprenons que ce livreur fait 3 fois le tour de la ville ou prend une route trop longue dans le monde, nous serons en mesure de lui dire ! Et de changer de transporteur ou de fournisseur à notre prochain achat !
Parmi les professionnels du CELO 2024, les clients africains également préoccupés par le transport et la pollution.
Oui, cette année encore des gestionnaires de ports maritimes africains seront là au même titre que des Européens pour discuter de l’énorme potentiel de l’IA. Contrairement à des idées répandues, les technologies, notamment en termes de paiement à distance, sont depuis longtemps arrivées dans les pays africains.
Venez jeunesse, du travail pour vous ! Quel que soit le continent, africain, asiatique, européen, votre mantra est de dire que la logistique, le transport de marchandises a besoin de monde, on embauche !
Oh oui ! Et je sais combien les jeunes s’épanouissent dans le transport. Ingénieur, chauffeurs, livreurs, informaticiens, c’est un domaine extrêmement large qui couvre une multitude de métiers et de tâches différents.
Le souci, dites-vous, c’est qu’en France, il y a un manque de communication. Les jeunes à l’école ne connaissent pas suffisamment ces métiers.
Parfaitement ! C’est bien dommage et je me bats pour faire connaître la logistique et les joies que ces métiers vont leur apporter. Faire partie de l’économie et de la réussite de son pays, c’est une belle mission, non ?
En France, comment faire pour pallier ce manque ?
Heureusement, ça commence doucement ! Des fournisseurs, des transporteurs et même des sociétés de camions routiers font visiter des entrepôts ou font assister à des manœuvres. Au collège, au lycée ça fonctionne très bien. Je m’en réjouis.
Est-ce le cas dans tous les pays européens ?
En matière d’éducation certains de nos voisins font des merveilles ! Les Allemands ou les Suisses parviennent à embaucher des jeunes sans diplômes qui progressent remarquablement vite une fois formés. En France, nous sommes encore trop figés dans le : « il faut tel ou tel diplôme pour ce métier-ci ou ce métier-là. »
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Lien utile :CELO 2024
Sat, 23 Mar 2024 - 157 - Le «Ro-Ro», le bateau roi des transporteurs de voitures
Dans l’histoire de la marine marchande, c’est du jamais-vu. Record cette année des commandes de « Ro-Ro », des rouliers, ces bateaux dédiés au transport de véhicules. Des navires si pratiques que les plus gros constructeurs de voitures électriques au monde, les Chinois de chez BYD, possèdent leur propre roulier. Le mois dernier, dans un port du nord de l’Allemagne, 5 500 voitures sont sorties d’un seul navire roulier chinois. Les Français ont aussi des idées innovantes pour occuper le marché des rouliers.
On les appelle les « Ro-Ro », de l’anglais Roll-on, Roll-off (« embarquer/débarquer en roulant »). Ces navires sont aussi méconnus du grand public qu’originaux et imposants. Ils sont reconnaissables à leurs rampes de chargement. Un équipement qui leur permet d’embarquer tout type de véhicule roulant à plat. Tout le contraire des manœuvres en hauteur pour les autres paquebots de marchandises où l’on utilise des grues à conteneurs.
Aymeric Avisse est officier de marine marchande, il dirige aussi la revue Jeune Marine. Les rouliers, il les a pratiqués sur toutes les mers du monde :
« En anglais, on ne dit pas "Ro-Ro", on dit "Car Carriers". Les rouliers possèdent un grand nombre de ponts-garage. Ces modèles transportent des voitures entre l'Asie et l'Europe. Vous avez d'autres modèles de rouliers qui ont des ponts capables de s'adapter aux formats des véhicules. On les voit plus le long des côtes africaines. Leurs rampes spécifiques permettent le transport de camions, des engins de chantiers et des bus. Certains rouliers existent pour le transport plus volumineux, je pense aux pièces de la fusée Ariane ou de l'Airbus A380. »
Tous les ports ne peuvent pas accueillir les rouliers. Il n'est pas nécessaire d'avoir des bassins en eaux profondes. En revanche, il faut des quais sur lesquels on puisse poser les rampes d'accès aux navires.
Neoline, le champion du roulier à voiles
En France, les rouliers ont de l’avenir, et sans aucun doute un avenir pionnier. C’est une première : l’entreprise française Neoline a inventé un nouvel engin, le roulier à voiles. Un nouveau bateau roulier plus écologique pour protéger la planète.
CMA-CGM, le géant français du transport logistique, ne s’y est pas trompé, il participe au projet Neoline. Jean Zanuttini, le président de Neoline, prévoit de construire un second roulier écologique d'ici 2026.
« Le souci écologique chez les armateurs est aujourd'hui mondial,dit-il. C'est vrai que notre roulier à voiles Neoline est plus lent et plus petit que les autres. Mais nous nous distinguons par trois choses, explique Jean Zanuttini :d'une part, une hauteur de plafond de garage plus haute (de l'ordre de 9,80m), ensuite, nos routes sont des routes qui n'existent pas encore. Nos lignes se trouvent entre le port français de Saint-Nazaire, et américains d'Halifax, et ceux de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Baltimore. Nous proposons des offres pour d'autres types de marchandises que des véhicules roulants. D'autre part, avec nos déchargements, nous évitons à nos clients proches des ports le rechargement sur des camions routiers jusqu'aux usines ou entrepôts. »
Sur le podium du marché des rouliers, on trouve les Japonais, les Coréens et les Européens. Mais les Chinois arrivent très vite derrière. D’ailleurs, sur les 183 commandes mondiales de nouveaux rouliers, une bonne moitié sortira des chantiers de construction chinois.
Sat, 16 Mar 2024 - 156 - L'Europe surveille ses câbles de mer: «Le risque de sabotage existe»
Les câbles sous-marins font 30 fois le tour de la terre, ils entourent la planète, sont les plus grands transporteurs de données internet au monde et pourtant ils nous restent invisibles. Menaces et guerres oblige, l'Europe veut resserrer la surveillance de ses câbles sous-marins. Entretien avec le Français Jean-Luc Vuillemin qui dirige le service international du groupe Orange.
RFI : L’actualité (guerre en Ukraine, Gaza, menaces cyber…) pousse l’Europe à sécuriser son transport d’informations virtuelles via les câbles sous-marins. Quel est l’enjeu ?
Jean-Luc Vuillmin : L’économie dépend des câbles sous-marins. Leur rôle est crucial. L’économie européenne est d’autant plus concernée qu’elle dépend directement des firmes américaines pour le stockage et le transfert des données virtuelles.
Un exemple ?
Lorsque nous visionnons un film sur YouTube ou qu’une entreprise veut avoir accès à ses fichiers, les applications utilisées se trouvent aux États-Unis chez les géants de l'Internet (Google, Amazon, Microsoft…) qui transportent les informations par câbles sous-marins.
C’est peu connu, 99% des données voyagent au fond des mers. C’est beaucoup plus que par les satellites. Les câbles sont incontournables ?
Oui. Aujourd’hui, compte tenu des flots d’informations, de services et d’échanges internationaux, il n’y a pas d’alternative aux câbles sous-marins.
Cette importance des câbles sous-marins dans notre économie et notre vie quotidienne est méconnue du grand public, pourquoi ?
Vous savez, les marins ont un vieux proverbe : « Ce qui est en mer, reste en mer. » Donc ça reste inconnu.
Webdoc RFIUn océan de câbles, dans les profondeurs d’Internet
Comment sont installés ces câbles au fond de l’eau ? Enterrés, pas enterrés ?
Dans les zones proches des côtes, ils sont enterrés pour éviter les risques de destruction ou de sabotage. Au large, ils sont simplement posés au fond de la mer.
Vous parlez d’accidents et de risques matériels, quels sont-ils ?
Contrairement à une légende, les requins ne sectionnent pas les câbles. En revanche, les hélices des bateaux de pêche, les ancres, les manœuvres des chalutiers ou des navires de toute sorte, font partie des risques d’accident. Les tremblements de terre également. Mais en général, les fibres optiques sont quand même renforcées par des protections adaptées et bien protégées.
L’épaisseur d’un cheveu ! Ces fibres optiques qui transportent nos informations virtuelles sont extrêmement fines.
C’est exact ! La comparaison avec les cheveux est bonne. Quant à la gaine de protection, elle est plus épaisse. En moyenne, un câble fait 1,5 cm de circonférence.
Voilà pour l’épaisseur. Pour la longueur, c’est une tout autre affaire ? Près de 30 fois le tour de la Terre, c’est bien ça ?
Oui. Cette quantité de kilomètres de câbles tisse une toile physique comme des serpents au fond des mers et des océans. Ils s’en posent de nouveaux chaque année, tout ce réseau relie les continents entre eux.
Si l’Europe cherche à sécuriser son réseau de câbles, c’est en raison des menaces de sabotage. Pour le moment, il n’y a pas eu de sabotages rapportés par les Européens.
Mais c’est vrai, ce risque existe et il faut s’en préoccuper. Il s’agirait alors d’un acte criminel équivalent à l’attaque d’un pays. C’est un peu comme si sur terre, on attaquait le réseau électrique d’un pays, ce qui est considéré comme un acte de guerre.
Faites-nous rêver ! Vous revenez juste d’une épopée, un voyage à bord du Sophie Germain (du nom de la mathématicienne française), le dernier-né des câbliers ?
Oui, c'est vrai que le commun des mortels n’a pas accès aux câbliers. Je suis parti d’Asie pour arriver en France, au port de Marseille qui possède un « hub » de câbles, une plateforme géante de câbles sous-marins. Ces bateaux sont rares, il en existe seulement une quarantaine dans le monde. Ils sont très chers et demandent un équipement et des équipages très bien formés. Ils sillonnent les mers pour surveiller et dépanner les câbles. Ce sont les seuls navires capables de tirer les câbles hors de l’eau.
Et la France est en tête du marché, première sur le podium des câbliers ?
Effectivement, la France est un fleuron du marché des câbliers. Un peu plus du tiers des câbliers sont français. Cela aussi, c’est assez peu connu du grand public.
Sat, 09 Mar 2024 - 155 - L'avenir de l'Afrique se jouera sur ses ports
Des ports oui, mais à condition qu'ils soient reliés aux routes et aux chemins de fer. Fréderic Maury conseille les États africains. Fin connaisseur de l'économie africaine, il publie, chez Okan Partners, un nouveau rapport sur le développement maritime du continent.
RFI : Vous décrivez dans ce rapport d'Okan Partners les grandes plateformes portuaires en Afrique. De véritables piliers pour l'avenir du continent.
Frédéric Maury : En effet, quatre ports, Durban [en Afrique du Sud, ndlr] Tanger-Med [au Maroc, ndlr] l'ensemble des ports égyptiens et le port de Lomé [Togo, ndlr]. Tous ces hubs [grandes plateformes, ndlr] sont de véritables places fortes en Afrique. Les navires de marchandises y débarquent leurs marchandises qui sont ensuite transportées dans le pays, chez ses voisins et ailleurs sur le continent ou dans le monde.
Vous dites dans ce rapport que la réussite de ces ports tient à la présence, à côté du port, d'usines et de sociétés économiques.
Parfaitement ! C'est l'enjeu d'un bon développement maritime. Savoir coller la construction des produits aux quais des ports maritimes.
Vous saluez, entre autres, le port de Tanger-Med au Maroc.
Oui, le Maroc a voulu développer son industrie d'automobiles et de matériel aéronautique en plaçant les usines à proximité du port.
Vous conseillez les gouvernements africains qui voudraient développer leurs propres ports de ne pas vouloir tout manger ! Mieux vaut commencer petit pour ensuite devenir plus puissant et plus grand.
Maintenant qu'il existe ces grandes plateformes de transfert de marchandises, l'intérêt, c'est de développer sa propre stratégie avec ses propres ressources. Construire des ports liés à une industrie, des produits ou des savoirs-faire typiques du pays en question. Je pense au commerce et à la découpe du bois par exemple ou d'autres richesses…
Comme le port de Shenzhen en Chine ?
C'est en effet un cas remarquable que nous citons dans le rapport ! Ce petit port chinois était dans les années 2000 un petit port de pêche de la Chine occidentale du sud. Il est aujourd'hui le 15e port commercial du monde !
Vous le regrettez, l'Afrique se développe trop lentement. L'une de vos stratégies pour accélérer et augmenter la richesse du continent est de construire des routes et d'autres moyens de communication.
C'est une évidence ! La réussite des ports cités dans notre conversation tient à ça. Tous les pays ont développé leurs réseaux de trains, d'acheminements routiers, et même en construisant de nouveaux aéroports. C'est une volonté politique.
La réussite d'un partenariat public/privé ?
Oui ! C'est ce que notre rapport met en évidence. Un pays ne peut pas tout financer. Il faut savoir compter sur des partenaires privés tout en continuant à avoir une partie dans la participation des projets.
L'actualité de 2024 avec les attaques de navires marchands en mer rouge, proche de l'Érythrée rattrape l'actualité portuaire. De nombreuses compagnies de transport évitent la région et évitent le Canal de Suez plus au nord, en Égypte, en faisant transiter leurs chargements le long de l'Afrique du Sud. Pensez-vous que certains ports africains vont y gagner ?
Oui ! Sans hésiter, je dirai que cela va sans doute faire monter la valeur et entrainer l'intérêt des ports d'Afrique de l'Est. Souvent des vieux ports et mal gérés. C'est d'ailleurs déjà le cas pour le port de Dar-es-Salaam en Tanzanie. Ce port vient d'être concédé au géant de la logistique Dubaï Dp World.
LIENS UTILES :
À lire aussiLe secteur maritime en Afrique en quête de décarbonation [1/2]
Sat, 24 Feb 2024 - 154 - Un contrôle médical pour le permis de conduire fait débat au Parlement européen
Faut-il imposer une visite médicale pour le permis de conduire en Europe ? En ce mois de février, la question occupe le Parlement européen chargé du vote final. À l’origine, il s’agissait d’un examen de santé réservé aux personnes âgées. Mais les idées et les textes ont évolué. Le projet de loi recommande désormais une visite pour tous les conducteurs, à renouveler tous les 15 ans.
Les conducteurs vieillissent, mais les lois aussi. En Europe, en matière de permis de conduire, chaque pays fait comme il veut. La Belgique et la France n’imposent aucun contrôle médical. Alors que chez les Hollandais, les Italiens ou les Grecs, au-delà de 65 ans, il faut aller chez le médecin.
60 morts par jour en Europe
C’est ce manque d’harmonisation qui met en colère Karima Delli. Présidente de la Commission transport au Parlement européen, elle a rédigé le projet de loi : « Les règles en vigueur sont périmées, elles datent de 2006. En Europe, savez-vous que 60 personnes meurent chaque jour sur les routes ? La priorité est la sécurité sur nos routes. Mon projet de loi propose une visite médicale pour les conducteurs, à renouveler tous les 15 ans. Prenez par exemple les problèmes de vue. Tout le monde peut en avoir, les jeunes comme les personnes âgées. La vue évolue et souvent, on ne s’en rend pas compte. Pensez à la ceinture de sécurité, il y a eu beaucoup de contestation avant qu’elle ne devienne obligatoire. »
Liberté des conducteurs
Côté opposition, on trouve la majorité des associations d’automobilistes. Elles estiment que chaque citoyen est assez grand pour savoir s’il est ou non en capacité de conduire. Me Rémy Josseaume est avocat français spécialiste de la sécurité routière. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il ne voit aucun intérêt à changer la loi : « Cette proposition est une mauvaise mesure. Elle vise en fait à vouloir englober la population sur des cas d'accidents de circulation, souvent à la suite de faits-divers ou d'actualité avec des personnes âgées ou au contraire, de très jeunes conducteurs. De plus, les médecins que j'ai interrogés ne reconnaissent aucun bénéfice à cette visite. Et enfin, l'arsenal judiciaire existe déjà en France. Le préfet est en mesure, en cas de signalement d'un conducteur à risque, de lui faire passer un examen médical et ainsi d'effectuer le contrôle sur les capacités à conduire.»
Voitures, mais aussi motos, bus et camions. Cette loi européenne, si elle est votée, obligerait l’examen médical pour tous les conducteurs de ces types de véhicules.
À écouter aussiLe permis de conduire à l'étranger
Sat, 17 Feb 2024 - 153 - Les navires et le cosmos: quand les bateaux sont surveillés depuis l'espace
Les navires vus du cosmos. Cela peut paraître étrange, pourtant, cela existe ! Et c'est même l'un des enjeux les plus importants de l'avenir du transport de passagers et de marchandises. Fin janvier, les professionnels de la mer étaient à Marseille dans le sud de la France pour les Rencontres Euromaritime. La surveillance spatiale et les satellites ont fait partie des débats d'actualité.
Avez-vous remarqué ? Il n'y a jamais eu de « deuxième Titanic». Un naufrage aussi catastrophique sur les mers du monde. C’est grâce au ciel, aux satellites.
L'AIS, Système d'authentification satellitaire
Cet humour britannique est justement l'œuvre d’un Britannique, Nick Appleyard, directeur de l’Agence spatiale européenne. Sa qualité d'expert en télécommunications lui permet de comprendre les données d'une vingtaine de satellites spécialisés. Ces gendarmes de la route maritime, dit-il, dont les capteurs et les radars voient et enregistrent tout, courants, vitesses de navires ou cargaisons :
«Vous savez, c'est en mer comme pour le GPS sur les trains ou les camions. L'espace, avec les satellites, permet une qualité de connexions plus efficace que les moyens terrestres qui sont vulnérables (obstacles, habitations, murs, météo…) Ensuite les satellites et les radars photographient en précision les navires et les dangers de la mer : les icebergs, les marées noires, les nappes de plastiques ou les algues... Autant de paramètres utiles aux marins et aux armateurs qui peuvent gagner du temps et mieux gérer leurs trajectoires. »
Lutte contre la pollution
Le développement des calculateurs et de la nouvelle Intelligence artificielle, appelée générative, va transformer surveillance des navires. Plus rapides, plus précis, les outils calculent les vitesses pour économiser le carburant.
Grâce aux innovations de la nouvelle intelligence artificielle, les satellites permettront d'élaborer des outils qui arriveront à faire piloter à distance un navire en difficulté de manœuvres au port ou dans un canal.
Pétroliers russes et attaques en mer Rouge
Paul Tourret, directeur de l’Isemar, l'Institut supérieur d’économie maritime, y voit un autre avantage directement lié à l’actualité des attaques de navires au large du Yémen :
«Je cite juste deux exemples de surveillance satellitaire lié à l'actualité chaude de 2024. Les navires pétroliers russes et les attaques de cargaisons par les rebelles Houthis en mer Rouge. Le transport de pétrole russe est sous sanctions, mais pas illégal. Grâce aux satellites, nous pouvons surveiller les cargaisons et les routes qu'ils suivent jusqu'à leur destination. Quant aux attaques au large du Yémen, les Houthis se servent des signaux envoyés par connexions satellitaires pour obtenir les informations sur les bateaux. Alors, bien sûr, les navires peuvent éteindre leur connexion. Cela met en danger non seulement l'équipage et les marchandises, mais aussi toute la sécurité du trafic maritime international. »
Conscient de l’enjeu du spatial pour gagner la bataille contre la pollution, l’armateur français CMA-CGM a signé un partenariat (2021-2026) avec le CNES, le Centre national d’études spatiales.
Sat, 10 Feb 2024 - 152 - Le Bangladesh et ses carcasses de navires
Des cadavres de navires sur les plages du Bangladesh. Les images de grosses carcasses métalliques sont choquantes. Des paquebots venus d'Europe et d'autres continents découpés par des ouvriers sans casque et sans masque. Dans leur dernier rapport, deux organisations, dont Human Rights Watch, tirent la sonnette d'alarme. Au mépris des lois, certaines filières de transport maritime s'imposent sur le marché de la démolition de navires.
(Rediffusion du 23/12/2023)
Dire aux Européens que leurs plats, poissons ou coquillages sont remplis d’amiante, d’huiles et de gaz toxiques invisibles pourrait peut-être faire bouger les choses ? La pollution des carcasses de navires se retrouvent dans la mer et donc, dans les assiettes.
Depuis 20 ans, Ingvild Jenssen milite pour le Bangladesh au sein de l’organisation européenne Shipbreaking. Son rapport est rempli de témoignages (à consulter ici, en anglais). Des travailleurs dotés d'uniformes, mais pas à la bonne taille. Peu protégés, ils se sont blessés. D’autres sont morts en tombant des parois de navires ou des échelles, ils n’avaient pas de ceintures de sécurité.
«Sept ouvriers sont morts cette année au Bangladesh sur la plage de Chittagong», explique Ingvild Jenssen. « Ceux que nous avons interrogés pour notre rapport nous disent avoir peur de mourir en allant travailler. C’est le manque de sécurité qui nous a fait rédiger ce rapport de 2023, avec Human Rights Watch. Des adolescents et des enfants sont employés par les chefs de chantier. La démolition et la revente des matériaux profitent aux cash des filières en Europe (Athènes ou Hambourg…) qui aident les armateurs à cacher ou modifier la nationalité et les produits contenus dans les navires. »
Des filières pour masquer l'origine et les matériaux
De leur côté, les armateurs et les dirigeants politiques interrogés se cachent derrière la loi internationale. Les textes existent, mais ils ne sont pas respectés. Alors pourquoi ? Quel est l’intérêt, malgré cette convention de Hong-Kong, d’interdiction d’exporter des matières toxiques, les transporteurs européens, américains ou japonais continuent-ils de faire démolir leurs bateaux en Asie ? Parce que le marché du métal y est beaucoup plus intéressant.
«Effectivement, au Bangladesh, depuis 20 ans, aucun progrès n’est fait. Quand il y a des blessés, aucun centre médical ni hôpital ne se trouvent à proximité des chantiers de plages», déplore Jacky Bonnemains, qui dirige l’Association écologiste française Robin des Bois. « Mais je dois tout de même souligner les efforts de la Commission européenne ! La France, le Danemark notamment travaillent pour agréer des chantiers mieux sécurisés. Mais l'OMI, l'Organisation maritime internationale, n'est pas efficace. Notre association milite pour que les chantiers soient aussi bien réglementés en Europe qu'au Bangladesh ! »
Des chantiers en Turquie
La Turquie, un pays dont on parle moins que le Bangladesh, l'Inde, le Pakistan, reste en tête du démantèlement maritime. Toutes les organisations citées dans cette chronique espèrent beaucoup du calendrier 2024 ! Bruxelles a prévu de revoir et de renforcer sa loi sur le démantèlement maritime.
Sat, 03 Feb 2024 - 151 - Assurances transport, le risque politique en tête
Attaques en mer Rouge, guerres en Ukraine ou au Moyen-Orient, les conflits passent en tête des risques du transport. Dans son dernier sondage, le groupe d'assurance Allianz dresse une échelle des préoccupations de 2024. Analyse de Sarah Delhelle, responsable des études Allianz.
RFI : Vous publiez donc ce sondage sur les priorités des transporteurs. Avec cette année sur le podium des risques les plus cités, le risque politique...
Sarah Delhelle : Effectivement. C’est l’un des changements majeurs comparé aux années précédentes. Ce risque politique fait suite au contexte mondial. Il y a la guerre en Ukraine, au Moyen-Orient, et aussi dernièrement les tirs sur les navires en mer rouge. Les entreprises du transport sont très concernées par tous ces risques parce qu’elles posent des problèmes d’approvisionnement.
Vous dites que les risques sont interconnectés, c’est-à-dire ?
Les entreprises comme clients de logistique, du transport se sont rendu compte de leur dépendance vis-à-vis de certains transporteurs ou de certaines routes. Notre rôle à nous, c'est de les aider à trouver des alternatives. C’est la force d’un grand groupe comme Allianz. Notre réseau de clients est mondial et diversifié. Nous pouvons très vite trouver des usines du groupe (Grands groupes, PME, PMI…) qui vont trouver un intérêt à collaborer.
Quelle stratégie proposez-vous ?
Il s’agit d’étudier avec eux, de créer des plans d'interdépendance avec les fournisseurs. Cela va servir à optimiser, à mutualiser les solutions.
La surprise de ce sondage 2024 est le risque d’explosions et d’incendies...
Oui. Cela nous a d’abord étonnés. Ensuite, nous avons compris que cette importance accordée aux explosions est directement liée aux cat-nats.
Alors ce mot « cat-nat », c'est du jargon d'assureur !
Les cat-nats, pour catastrophes naturelles.
Donc en quoi sont-elles liées aux transporteurs ?
On l’a vu dans certaines catastrophes (tsunami, feux, tremblements de terre…) toutes ces catastrophes naturelles peuvent engendrer des explosions de bâtiments, de véhicules, d'infrastructures… Les chaînes d’approvisionnement peuvent en être facilement rompues.
Continuons le palmarès des risques de 2024. Les entreprises craignent les attaques informatiques, ce qu’on appelle les attaques cyber...
Oui. C’est aujourd’hui le risque qui figure parmi les grandes priorités de nos entreprises. Chaque année, des entreprises, mais également des services publics sont attaqués avec les phénomènes de rançons, de vol de données qui s’ensuivent.
Pourtant, le risque existe pour ces grandes entreprises. Par le biais de leurs sous-traitants ?
C’est vrai. C’est l’un des points à souligner. Toutes nos enquêtes le prouvent. Les malfaiteurs cherchent de nouvelles portes d’entrées plus faciles à ouvrir. Ils peuvent y arriver en posant des virus dans les systèmes des sous-traitants des grands groupes. Et même des sous-traitants de sous-traitants.
2024, année électorale aux USA, mais aussi dans plusieurs grands pays du monde, va-t-elle favoriser ce risque d’attaques cyber ?
C’est certain. Chaque élection fait naître du mécontentement, des revendications. Mais aussi n’oublions pas lors des campagnes électorales, la diffusion de fausses informations au sein des entreprises et sur les réseaux sociaux. Nous proposons aux clients des solutions pour se prémunir, car toutes les entreprises vont êtres des cibles pour ce risque cyber.
Sat, 27 Jan 2024 - 150 - Accord économique entre la Chine et le Nicaragua: «Pékin est déjà bien installée en Amérique latine»
Juste avant Noël, les deux dirigeants de la Chine et du Nicaragua, en Amérique latine, se sont appelés. Ensemble, ils ont confirmé les 430 millions de dollars prêtés par la Chine. Cette année, des travaux sont annoncés sur l'aéroport de Managua, la capitale du Nicaragua, mais aussi d'un canal maritime et d'un terminal gazier. Cet accord économique cache une dimension politique. Le Nicaragua ayant dû retirer sa reconnaissance de Taïwan comme pays indépendant. Analyse de Garance Robert, chercheuse à l'Université de Québec.
RFI : La Chine qui conditionne les travaux du transport à la non-reconnaissance de Taïwan… Que pensez-vous de cette attitude ?
Garance Robert: Ce n’est pas étonnant. Pékin est déjà bien installée en Amérique latine, elle recherche de nouveaux marchés en Amérique centrale avec des pays dont elle exige ces conditions politiques.
Aéroports, ports, terminaux gaziers, le transport, dites-vous, est emblématique de ce que vous appelez une sorte « d’entrisme » sur le continent sud-américain.
Effectivement, le projet le plus symbolique est sans doute le canal interocéanique.
En quelques mots, en quoi consiste ce projet de ce canal interocéanique ?
C’est en réalité un vieux projet qui date du XIXe siècle. Il s’agit d’une large bande de passage maritime qui relierait la côte Caraïbes à la côte Pacifique du Nicaragua. Le projet s’il existe un jour… car il est très coûteux avec des travaux gigantesques pour creuser le sol sur 120 kilomètres.
Quel serait l’intérêt de ce canal pour le Nicaragua ?
Il permettait déjà de créer de l’emploi et de faire payer des droits de douanes aux bateaux qui passeraient par ce nouveau passage maritime.
L’autre projet plus réaliste est l’agrandissement de l’aéroport de Managua (la capitale) et de terminaux gaziers.
Oui, cela n’a rien de surprenant. La Chine veut s’implanter dans l’industrie minière et d'hydrocarbures en Amérique latine et Amérique centrale.
Concernant ce chantage politique sur Taïwan (le retrait de la reconnaissance de Taïwan de 2021) pour le prêt de 430 millions de dollars destinés aux transports, cette condition n’avait pas été exigée en Asie auprès de pays voisins où les Chinois ont investi dans les infrastructures ?
C’est vrai !
Comment l'expliquez ?
On peut l’expliquer par la faiblesse de la position du Nicaragua au plan international et au plan américain. N’oublions pas que le pays est isolé depuis la répression de 2018 qui a fait plus de 400 morts. Les dernières élections ont également été dénoncées par la plupart des pays d’Amérique latine ainsi que des pays occidentaux pour les atteintes aux droits de l’homme.
Les accords de libre-échange qui viennent d’être signés entre la Chine et le Nicaragua facilitent-ils ces accords en matière de transport ?
Oui, l’argent chinois est le bienvenu et d’autant plus recherché que d’autres pays voisins se sont détournés du Nicaragua en raison de sa politique intérieure.
Généralement, on dit que les Chinois avec leurs projets des Routes de la soie (réseau mondial de transport) endettent les pays auxquels ils prêtent de l’argent. Mais ne peut-on pas se réjouir de ce potentiel qui a déjà permis le développement de trains, de routes, de ports dans d’autres pays en Asie ou en Afrique ?
Effectivement, mais à quel prix humain et environnemental ! Créer des emplois, c'est bien beau. De la corruption, des ouvriers non protégés et peu payés... Pour des constructions de quelle qualité ? Il faut aller y regarder de près.
Le mot de la fin ?
Toutes ces entorses aux droits humains et environnementaux que l’on a vues et que l’on voit encore en Afrique, en Asie, mais aussi en Europe, et qui sont illégales… Le développement, oui, d’accord, mais je ne suis pas certaine qu’on puisse dire que celui-ci soit profitable.
Sat, 20 Jan 2024 - 149 - Alberic de Bernis, créateur de montransport.com: «Un taxi peut être moins coûteux qu’un transport traditionnel»
L'idée lui est venue un jour de grève des transports français. Alberic de Bernis avait tellement peiné à trouver un taxi disponible que ce jeune entrepreneur a inventé un concept : montransport.com. Une application téléphonique qui permet, non seulement de trouver un chauffeur, mais aussi de comparer les prix. Après la France, montransport.com se lance en janvier chez les voisins européens. Rencontre.
RFI : Votre invention montransport.com est un outil pour réserver ses transports en taxis depuis son téléphone portable ? Expliquez-nous.
Alberic de Bernis : C’est bien cela. Nous comparons toutes les compagnies qui existent dans une ville. Ainsi que leurs tarifs. Grâce à notre application, vous comparez les meilleurs trajets aux meilleurs prix.
Quels types de compagnies de taxis ?
Nous proposons les quatre types de véhicules : les VTC (Véhicules de tourisme avec chauffeurs) qui ont leur propre licence et leur propre société (du style Uber…) ou les radios taxis et toutes les compagnies de taxis qui existent dans une ville dans la zone de départ du client.
Il suffit de télécharger l’application : montransport.com ?
Oui, vous vous connectez, puis vous indiquez votre lieu de départ et d’arrivée. À partir de là, nous calculons les prix et les distances pour que toutes les solutions soient proposées. J’ajoute que nous affichons également la note de réputation des chauffeurs et des compagnies.
Vous vous définissez comme une start-up, une petite entreprise, mais vous êtes loin d’être tout petit. Puisque vous avez décroché le marché européen pour 2024.
Oui, nous travaillons donc en France (Corse, départements d’Outre-mer) et nous élargissons : à la Belgique, à l’Espagne et à l’Allemagne.
Vous avez étudié les différentes habitudes de transport en taxis dans tous ces pays. Y a-t-il des différences de culture liées à l’emploi du taxi ?
Oui, il y a des différences. Mais plutôt ville par ville, beaucoup plus que pays par pays. Par exemple, l’habitude de voyager en taxi à plusieurs, les horaires de travail très spécifiques.
L’une des originalités de montransport.com est de proposer des trajets en commun dans un même taxi.
Oui, c’est ce qui fait baisser considérablement le prix de la place.
Vous dîtes même qu’il arrive qu’un trajet de plus de 100 km peut coûter moins cher qu’en train.
C’est vrai. En période de grève des transports ou lorsque tous les autres transports sont occupés en raison de fortes affluences sur les routes (vacances, période pointe…), un taxi peut être moins coûteux qu’un transport traditionnel.
Dans votre clientèle, quelles sont les demandes aujourd’hui à propos des taxis, les attentes ?
Nous travaillons essentiellement avec toutes les classes d’âge, mais avec une petite majorité de jeunes adultes et d’adultes (voyages d’affaires, départs en vacances.) C’est pour cela que partout en Europe, les sièges bébés font partie des nouvelles demandes. Il y a aussi de nombreuses demandes pour des voitures fumeurs.
Le mot de la fin ?
Le souci écologique. Il fait aujourd’hui partie des préoccupations. Avant de réserver un véhicule, les clients demandent à bénéficier d’une voiture ou d’un transport électrique, hydrogène ou hybride.
Sat, 13 Jan 2024 - 148 - La montée en gamme des trains de nuit
Ce sera l'un des enjeux européens de 2024 : le retour des trains de nuit ! Délaissées au profit des transports à grande vitesse, les trains de nuit sont aujourd'hui réclamés par le public. Il y a à peine un mois, le nouveau Paris-Berlin était inauguré. En Europe, l'Autriche avec sa compagnie ÖBB est le pays qui a le plus financé les transports nocturnes. Mais comme ses futurs concurrents, elle devra miser sur les nouvelles demandes du public : le confort à bord.
(Rediffusion du 21 octobre 2023)
Prendre sa douche le train, se faire réveiller à l’heure souhaitée, avoir son W.C. et une lumière personnalisée, les couchettes génération 2023 ne sentent plus la chaussette mouillée comme plaisante Patrick Laval. Adepte des voyages nocturnes, expert du ferroviaire au magazine La vie du Rail, il connait la réputation de la compagnie nationale autrichienne ÖBB, un modèle en Europe.
Mais Patrick Laval prévient, la France pourrait faire tout aussi bien que l'Autriche. Le problème, explique-t-il, c’est qu’aucun gouvernement européen n’est aussi convaincu par la rentabilité des trains de nuit que le gouvernement autrichien. En Autriche, ÖBB a eu le courage, il y a dix ans, de parier sur les trains de nuit en profitant du réseau ferré autrichien, mais également d'anciennes lignes allemandes. De cette façon, ils ont pu bâtir des trajets de 1 000 km au travers de l'Europe. Ce qui fait toujours 8 à 9 heures de train et une nuit d'hôtel économisée.
S'adresser à un large public
L’Europe, l’un des continents du monde les plus équipés en voies ferrées, souffre de vieillesse et de manque de coordination. Chaque pays a son matériel, ses types de rails. Empêcher les interruptions de connexion internet, voilà un autre défi. En 2024, l’entrepreneur français Adrien Aumont va lancer une nouvelle compagnie : Midnight Trains. Les trains proposeront dix destinations à travers l’Europe avec un confort digne de notre époque : « Pour réussir dans le train de nuit, le produit doit s'adresser à un public le plus large possible : aussi bien des étudiants que des voyages d'affaires que les familles. Si on veut que les gens remontent dans les trains de nuit, il faut ne proposer que des chambres privatives avec une literie de qualité et une bonne insonorisation. On remet une voiture commune avec un bon restaurant et un bon bar. Un endroit pour vivre un bon moment pour que ce soit un bon produit du XXIe siècle. »
Dans son enquête de 2022, la revue Global Train Review estime que 70% des personnes interrogées voyageraient en Europe en train de nuit plutôt qu’en avion, évidemment si l’offre existait.
Sat, 06 Jan 2024 - 147 - Mauricio Latorre et le doudou du métro
Responsables des services étrangers de nos antennes, ces journalistes sont arrivés en France après une jeunesse passée dans un pays du monde. Avion, train, métro ou voiture, ils comparent et racontent leurs aventures de transports en France et à l'étranger. Pour cette édition, direction l'Argentine. Au micro de Marina Mielczarek, le chef du service en espagnol de RFI, Mauricio Latorre.
[REDIFFUSION]
À écouter aussiSophie Guo, le métro juste cool
Sat, 30 Dec 2023 - 146 - Le Bangladesh et ses carcasses de navires
Des cadavres de navires sur les plages du Bangladesh. Les images de grosses carcasses métalliques sont choquantes. Des paquebots venus d'Europe et d'autres continents découpés par des ouvriers sans casques et sans masques. Dans leur dernier rapport, deux organisations, dont Human Rights Watch, tirent la sonnette d'alarme. Au mépris des lois, certaines filières de transport maritime s'imposent sur le marché de la démolition de navires.
Dire aux Européens que leurs plats, poissons ou coquillages sont remplis d’amiante, d’huiles et de gaz toxiques invisibles pourrait peut-être faire bouger les choses ? La pollution des carcasses de navires se retrouvent dans la mer et donc, dans les assiettes.
Depuis 20 ans, Ingvild Jenssen milite pour le Bangladesh au sein de l’organisation européenne Shipbreaking. Son rapport est rempli de témoignages (à consulter ici, en anglais). Des travailleurs dotés d'uniformes, mais pas à la bonne taille. Peu protégés, ils se sont blessés. D’autres sont morts en tombant des parois de navires ou des échelles, ils n’avaient pas de ceintures de sécurité.
«Sept ouvriers sont morts cette année au Bangladesh sur la plage de Chittagong», explique Ingvild Jenssen. « Ceux que nous avons interrogés pour notre rapport nous disent avoir peur de mourir en allant travailler. C’est le manque de sécurité qui nous a fait rédiger ce rapport de 2023, avec Human Rights Watch. Des adolescents et des enfants sont employés par les chefs de chantier. La démolition et la revente des matériaux profitent aux cash des filières en Europe (Athènes ou Hambourg…) qui aident les armateurs à cacher ou modifier la nationalité et les produits contenus dans les navires. »
Des filières pour masquer l'origine et les matériaux
De leur côté, les armateurs et les dirigeants politiques interrogés se cachent derrière la loi internationale. Les textes existent, mais ils ne sont pas respectés. Alors pourquoi ? Quel est l’intérêt, malgré cette convention de Hong-Kong, d’interdiction d’exporter des matières toxiques, les transporteurs européens, américains ou japonais continuent-ils de faire démolir leurs bateaux en Asie ? Parce que le marché du métal y est beaucoup plus intéressant.
«Effectivement, au Bangladesh, depuis 20 ans, aucun progrès n’est fait. Quand il y a des blessés, aucun centre médical ni hôpital ne se trouvent à proximité des chantiers de plages», déplore Jacky Bonnemains, qui dirige l’Association écologiste française Robin des Bois. « Mais je dois tout de même souligner les efforts de la Commission européenne ! La France, le Danemark notamment travaillent pour agréer des chantiers mieux sécurisés. Mais l'OMI, l'Organisation maritime internationale, n'est pas efficace. Notre association milite pour que les chantiers soient aussi bien réglementés en Europe qu'au Bangladesh ! »
Des chantiers en Turquie
La Turquie, un pays dont on parle moins que le Bangladesh, l'Inde, le Pakistan, reste en tête du démantèlement maritime. Toutes les organisations citées dans cette chronique espèrent beaucoup du calendrier 2024 ! Bruxelles a prévu de revoir et de renforcer sa loi sur le démantèlement maritime.
Sat, 23 Dec 2023 - 145 - Mexique, un nouveau couloir de marchandises
Jusqu’ici, on connaissait le canal de Panama. Le seul bras de mer capable faire passer les bateaux de marchandises du Pacifique à l’Atlantique. Désormais, le Mexique peut dire qu’il possède son propre canal ! Un canal non pas rempli d’eau, mais de voies ferrées ! En visite sur le site, le président mexicain vient de confirmer la date sur les réseaux sociaux. L’inauguration finale des 300 kilomètres, bâtis sur une ancienne ligne de train, aura lieu juste avant Noël, le 22 décembre.
Plateaux télévisés à Mexico ou dans l’État d’Oaxaca (dans le sud du pays) entre deux camions de chantier, le président Obrador tient à faire de ce passage de marchandises et de passagers une affaire personnelle.
Le corridor océanique, le projet d’Obrador
Cet été, les journalistes ont même eu droit à un cours présidentiel ! Cartes et images de synthèse à l’appui : « Maintenant, la sécheresse est apparue et le canal de Panama n’a pas assez d’eau pour laisser passer tous les navires,explique le président. Ce manque d’eau limite les tailles de navires et crée des embouteillages à certains endroits. C’est pourquoi ce corridor ferroviaire du sud mexicain sera une alternative à une bonne communication entre les océans, le Pacifique et l’Atlantique». Ce corridor, déjà baptisé corridor interocéanique de l'isthme de Tehuantepec, ambitionne de faire transiter 1,5 million de conteneurs par an.
Des parcs industriels et des hôtels de tourisme
Le tourisme en profitera. L’appel d’offres est lancé. Le gouvernement prévoit des connexions avec des routes qui mèneront vers le nord du pays.
Des frais de transport peut-être plus chers
David Guerrero, géographe à l’école supérieure des transports de Paris, estime que ce couloir va sans doute augmenter la note à cause de frais cachés : «Quand on compare deux routes, il faut tenir compte de l’ensemble de la chaîne. Contrairement aux passagers, les marchandises ne se déplacent pas toutes seules du train au bateau ou du bateau vers le train ! De port à port, dans le canal de Panama, il n’y a que deux ruptures de charges (quai maritime à quai maritime.) Si on parle du Mexique et du corridor avec ses ponts ferroviaires, il faut ajouter au moins deux fois plus de coûts de manutention supplémentaires».
Les trains, une ambition nationale au Mexique
Pour l’économiste spécialiste du canal de Panama Jules Hugot, l’investissement dans cette ligne arrive dans un cadre plus large de politique du transport par le train ! Sept grandes nouvelles voies sont promises au travers du pays. Là encore, ces lignes pourraient peut-être être plus rentables en matière touristique que de passages de marchandises : «Le bémol, c'est la capacité des trains. Les trains auraient une capacité de 130 conteneurs. À titre de comparaison, pour un seul navire sur le canal de Panama ce sont 6 000 conteneurs chargés ! D’autre part, ces investissements sont plutôt destinés à des marchandises exportées vers les États-Unis, beaucoup plus proches du nord du Mexique que du sud ! Il aurait peut-être fallu d’abord développer les lignes de trains sud-nord que cette ligne transversale ».
2 500 emplois indirects
Depuis 3 ans, l’agrandissement des rails et des ports du nouveau couloir de trains interocéaniques au Mexique a permis 800 emplois directs et 2 500 autres postes indirects comme la sous-traitance.
Sat, 16 Dec 2023 - 144 - Les poids lourds au régime
Après les voitures, l'Union européenne régule le transport poids lourds ! Il s’agit de transformer la flotte de camions européens en véhicules moins polluants. Publié mi-novembre, le programme est ambitieux. Bruxelles donne six ans aux constructeurs pour y parvenir. Parmi les solutions, on trouve les nouveaux carburants, les nouveaux moteurs et les nouveaux poids lourds. L’Union européenne estime que l’industrie routière a le choix. Seulement voilà, la route n’est pas si simple...
La lutte pour moins polluer n’est pas un match de football. Reconnaissons-le, des deux côtés, régulateurs européens comme constructeurs de cars et de camions, on s’accorde : il est important de réduire les gaz toxiques.
Mais comme toujours, lorsque des délais sont décidés et votés, les parties s’affrontent. Du côté Europe, Bruxelles demande que dans six ans, tous les camions et les cars construits soient 45 % moins polluants que ceux d’aujourd’hui.
Les constructeurs routiers veulent des bornes électriques
Côté défenseurs de la planète, on s’en félicite. Mais côté constructeurs maintenant… Changement impossible ! La Fédération des constructeurs automobiles l’a même dit aux députés : ils aimeraient pouvoir rouler avec de nouveaux camions électriques, mais d’abord, il leur faudrait des routes équipées en bornes électriques. Second point, le manque d’aides des gouvernements européens. Ils savent que sans avantages financiers, les entreprises de l’Union n’achèteront pas de nouveaux cars ou camions plus coûteux.
François Combes est le meilleur des spécialistes pour nous parler d’un autre point, moins souvent évoqué : la concurrence étrangère. Cet ingénieur des ponts, eaux et forêts, chercheur, enseigne aussi le transport routier à l’université Gustave Eiffel à Paris.
« Oui, il faut surveiller ce que proposent les constructeurs étrangers. Il doit y avoir un appui, une intervention publique pour aider à ce que ça se fasse, insiste-t-il. Comment faire si arrivent sur le marché européen des camions américains ou chinois dont le prix est en dessous du coût, parce que l'Amérique ou la Chine subventionne très fortement ces camions. C’est un problème de commerce international auquel il faut être vigilant. »
Trois voies envisageables
« Il y a trois voies : celle des carburants verts, celle de l’hydrogène et celle de l’électrique. Les carburants verts, ce qui est sympa avec cette solution-là, c'est que si on arrive à faire des carburants qui n'émettent pas les mêmes quantités de CO2, le transport routier peut garder sa façon de fonctionner. Deuxième solution : l'hydrogène. Alors pour moi, l'hydrogène, c'est un grand mystère. C'est très très cher, c'est très compliqué. Il faut le mettre sous pression, c'est étonnant qu'il garde cette place dans le débat. Une fois posé le diagnostic que je viens de poser, il reste l'électrique. Ça fait des très grosses batteries. La deuxième solution, ce qu'on appelle d'autoroute électrique, comme les trains, on a des câbles au-dessus de l'autoroute auxquels les camions viennent se brancher pour récupérer l'électricité. La batterie d'un camion, pour qu'il ait une autonomie correcte, doit être au moins cinq fois plus grand que pour une voiture. Ces batteries vont demander beaucoup de matières premières. Comment les prix de ces matières premières vont évoluer dans les années à venir ? C'est intéressant, on peut imaginer que le futur du transport routier soit électrique. »
À noter, quelques exceptions. Le transport professionnel, police, pompiers, ambulanciers comme les véhicules agricoles ou forestiers ne seront pas obligés d’être renouvelés d’ici la limite imposée. 2030 pour la première phase, 2035 pour la finalité des camions 90 % moins polluants.
Sat, 09 Dec 2023 - 143 - À l'aéroport de Francfort, il est possible de passer les portiques sans billet
C’est une première en Europe, un aéroport qui vous reconnait ! En Allemagne, Francfort devient la première ville où la reconnaissance faciale fait gagner du temps en évitant les attentes pour l'avion. La firme Sita a livré ces portiques capables d'analyser votre visage pour remplacer le billet et le passeport. Comment ça marche ? Sébastien Guérémy, vice-président des systèmes de sécurité chez Thalès, expert en nouvelles technologies, répond à RFI.
RFI : Comment ça marche ? Dès le premier pas dans l’aéroport, les portiques s’ouvrent ?
Sébastien Guérémy : Oui ! C’est bien de cela dont il s’agit. Les portiques que nous développons (ainsi que ceux de nos concurrents) fonctionnent sur le même modèle de reconnaissance. La photographie des visages de passagers aux différents points de passages (contrôle d’identité, bagages, embarquement…)
C’est une innovation, une première européenne en Allemagne à Francfort. Mais cette reconnaissance des passagers existe déjà ailleurs dans le monde. Chez Thalès, vous annoncez d’ailleurs d’autres aéroports équipés en Europe dès 2024.
Oui, en Italie notamment. Sinon, nous travaillons aussi pour des projets aux États-Unis et en Inde.
Certains voyageurs craignent ces nouvelles technologies. Ils sont bien conscients que les portiques de reconnaissance faciale réduisent l’attente, mais le vol de données personnelles les préoccupe.
Je comprends tout à fait leur peur. Mais je peux les rassurer. Premier point important, pour le moment aucun passager n’est obligé d’acheter un billet en reconnaissance faciale. C’est une proposition que le passager valide ou non. D’autre part, en Europe, le filet de sécurité est très élevé. Le RGPD (Règlement Général des Protections de Données) encadre bien ce que le citoyen peut livrer et comment il est protégé.
Décortiquons la mécanique. Pouvez-vous expliquer par quel moyen technologique une simple photo de visage ouvre des portes automatiques ?
Nous enregistrons la photo de visage que le passager aura prise chez lui avant son voyage et qu’il enverra à l’aéroport sur une connexion personnalisée. Comme nous aurons la photographie de son passeport, nos technologies permettent de les comparer et de valider la comparaison. Croyez-moi, nous avons testé toutes les fraudes possibles… Et nous savons qu’aujourd’hui les systèmes peuvent être mis en service.
Comment convaincre les plus rétifs ?
En leur expliquant le fonctionnement. Et déjà en leur disant ce que nous faisons déjà en matière de sécurité de leurs papiers d’identité depuis des années. Nous sommes des experts de la sécurité numérique et donc suffisamment entraînés ! Nos entreprises réussissent déjà depuis des années à sécuriser les photographies des documents d’identité (carte d’identité, passeport, permis…)
Quels sont les principaux bénéfices des portiques à reconnaissance faciale ?
J’en vois quatre principaux. Premièrement, réduire de 30% l’attente à l’aéroport, ensuite, s’assurer de son transport, puis dans un troisième temps, sécuriser l’aérogare en diminuant l’effet de foules qui favorise les actes malveillants, et enfin avantager les aéroports en leur évitant de construire de nouveaux halls. C’est l’une de leur préoccupation majeure aujourd’hui, pouvoir compter sur les infrastructures existantes en les aménageant au lieu de construire de nouveaux murs.
Pensez-vous que dans cinq ans, tous les aéroports européens seront dotés de tels portiques à reconnaissance faciale ?
Encore une fois, le trafic aérien mondial va augmenter dans les années à venir. Il s’agit d’équiper les aéroports pour fluidifier les flux et rendre les voyages agréables aux passagers. Mais personne n’obligera ceux qui le refuseront à passer par ces bornes de reconnaissances faciales.
À écouter aussiReconnaissance faciale: où fixer la limite?
Sat, 02 Dec 2023 - 142 - Tolt en voyage, le succès d'un youtubeur
Son prénom tient en quatre lettres : Tolt. Il est jeune, il voyage sans polluer et il a un succès fou. Ses deux créations sont à voir sur internet. Il y a d’abord le succès de sa chaîne YouTube, Tolt en voyage, et depuis deux ans, la consécration d’un site de transports bas-carbone, Hourrail.voyages. À la sortie du train, de retour de Vienne, la capitale autrichienne, Tolt a partagé ses projets avec Marina Mielczarek.
RFI : Tolt, ce rendez-vous dans une gare à Paris. De retour de Vienne en Autriche où vous avez visité les nouvelles voitures, les nouveaux wagons d’ÖBB, la Compagnie nationale ferroviaire d’Autriche.
Tolt : Oui, j’ai prévu de faire une vidéo sur YouTube, pour mon site Tolt en voyage et je diffuserai sur Instagram et plusieurs autres réseaux sociaux.
Puisque vous étiez invité par une compagnie ferroviaire, on pourrait vous soupçonner de ne faire que de la publicité
Pas tout à fait, non, puisque j’ai payé mon billet aller-retour de Paris à Vienne et que personne ne m’a payé pour cette mission.
Tolt en voyage existe depuis 9 ans. Il s’agit de votre blog sur vos destinations. Mais depuis 2021, vous dirigez le site Hourrail.
Hourrail propose plus de 200 destinations en temps réel. L’idée était de créer un site de trajets en France, en Europe, en Afrique du Nord et dans le reste du monde. Le but étant de rassembler les trajets les moins polluants. Cela englobe le train, le vélo… et même la voile !
Comment fabriquez-vous vos propositions ? Avec des algorithmes spécialisés dans le transport ou dans les comparatifs d’énergies ?
Non ! Tous les transports et les destinations proposées à l’adresse Hourrail.voyages ont été testés par notre équipe ! Il y a de l’humain derrière, j’y tiens beaucoup. Ce sont des expériences humaines et vécues avant tout.
Comment avez-vous eu l’idée ?
C’est venu d’une prise de conscience et de la part de remarques de mon entourage et de mes fidèles internautes ! Avec mon site de voyage, Tolt en voyage, cela faisait 9 ans que je faisais des trajets lointains en avion. Non seulement je prenais l’avion moi-même, mais j’encourageais des millions de personnes qui me suivent sur YouTube à faire la même chose ! Donc, à polluer la planète.
Le changement a été difficile à opérer ?
D’une certaine façon puisque les compagnies aériennes finançaient à plus de la moitié de mes revenus. Je ne suis pas là pour donner des leçons, mais j’étais vraiment perturbé par cette contradiction. Je ne me sentais pas très heureux. D’un côté, je voulais garder une planète vivable, de l’autre côté mon métier provoquait beaucoup d’émissions de gaz à effet de serre, de façon directe et aussi de façon indirecte.
Votre famille, vos proches, vous ont également poussé à le faire ?
Ils m’ont beaucoup aidé. Grâce à cette prise de conscience, j’ai creusé le sujet des émissions de l’avion comparées à celles du train. Puis sûrement, de ma part, il y avait une part de déni.
Expliquez-nous comment faire avec Hourrail si je suis un auditeur de RFI et que je vous écoute par exemple depuis la Suède ou du Portugal ?
C’est très simple ! Vous vous connectez sur Hourrail.voyages et vous faites votre recherche soit en fonction de vos besoins ou vos envies (montagne, mer…) Ou bien en fonction de votre ville de départ ou d’arrivée. Ça, c’est au choix.
En France, le gouvernement veut encourager le retour des trains de nuit. Le problème, c'est que ce retour a du mal à être décidé puisque les trains de nuit sont moins rentables que les TGV français qui roulent tous en journée ! Qu’en pensez-vous ?
Alors oui, évidemment, à 100 % pour les trains de nuit ! Le souci, c’est vrai, c’est qu’ils ne font qu’un seul voyage quand les TGV de jour font plusieurs voyages dans une journée. Partout en Europe, on sent un frémissement en faveur du train de nuit. Les trains de nuit permettent de gagner une nuit d’hôtel et de moins polluer parce qu’ils roulent sur de longues distances. C’est une offre complémentaire avec le TGV. Parfois, on peut avoir besoin d’arriver très tôt le matin dans une ville à l’autre bout du pays. Et ça, c’est moins possible avec le TGV.
On parle beaucoup de la qualité des trains autrichiens, suisses ou japonais, mais que pensez-vous des trains français ?
Je dirais d’abord, vive la France avec ses trains de qualité ! Moi, j'ai voyagé sur tous les continents du monde. Je peux vous dire que les Français ne s’en rendent pas compte. Mais le service ferroviaire est bon ! Nos TGV, les Trains à grande vitesse, circulent sur un large réseau entre les grandes villes du pays. Je trouve qu’on est quand même très durs avec notre système ferroviaire. Nos TGV, beaucoup de pays aimeraient les avoir !
De plus, il est extrêmement décarboné puisque l’électricité nucléaire en France est plus décarbonée qu’en Allemagne par exemple. Leurs trains sont beaucoup plus polluants. Donc, je pense qu’il faut aussi essayer de nuancer un peu à chaque fois et de se dire que, oui, en France, tout n’est pas parfait, mais quand même…
Quel est votre public ? Les moins de 25 ans ? Les seniors retraités ?
De tous les âges ! Avec, c'est certain, des jeunes, une cible plus adepte des réseaux sociaux. Mais nous recevons de plus en plus de messages de plus de personnes âgées soucieux de la santé de la planète.
À l’avenir… projets, évolutions d’Hourrail ?
L’idée, c’est de pouvoir voyager de façon bas-carbone un peu partout dans le monde.
Y compris aux États-Unis ou sur d’autres continents ?
Oui ! même si, pour le moment, les offres peu polluantes pour rejoindre les continents sont très limitées. Mais ça se développe. On peut parler, par exemple, des traversées à la voile qui permettent d’aller aux États-Unis. Il y a un acteur comme Sailcoop qui propose ses premières traversées à la voile transatlantiques. Donc, voilà, c’est encore très marginal.
Le mot de la fin ?
Il y a pas mal de bonnes choses à piocher dans beaucoup de pays. Après, honnêtement… En Europe, les formules : trains + vélo + marche à pied sont à encourager. C’est ce que nous allons faire sur le site Hourrail.voyages. En France, nous n'avons pas à rougir du choix de nos destinations et de nos transports.
Sat, 25 Nov 2023 - 141 - Transport maritime, l'effet boomerang
C'est dur, mais pas de quoi s'affoler ! Les chiffres du transport maritime viennent d'être publiés. Comparés aux années de la crise Covid-19, les bénéfices sont divisés par 18. Cependant, si cette chute concerne les plus grands transporteurs du monde, elle ne signifie pas l'effondrement. D'ailleurs, si l'entreprise française CMA-CGM prévoit une année 2024 difficile, les experts de l'économie maritime préfèrent parler de changements d'habitudes.
Vous divisez par onze, et là, vous prenez vraiment conscience de la différence de prix d’un acheminement avant et après la crise du Covid-19 !
L’effet boomerang était prévisible ! Mais les colosses du transport maritime de marchandises ont accumulé tant de profit durant la crise Covid-19 qu’ils ont de quoi rebondir.
Un coup dur, mais une santé de fer
Guerre en Ukraine, inflation, conflit à Gaza, les crises s’enchaînent. Les imprévus obligent les transporteurs à réagir et à s’adapter à une vitesse impressionnante. France Burnand, experte internationale de la logistique, explique que l’effondrement de profits chez les plus gros transporteurs du monde, le danois Maersk ou le français CMA-CGM sera au cœur des discussions de son salon OptimSalon, créé pour les professionnels :
« La situation de CMA-CGM n'est pas une surprise, quand on voit les records qu'ils ont enregistrés après la crise du Covid-19. Et comme tous les excès, à un moment le boomerang repart dans l'autre sens, tout se met à niveau. Après, imaginez qu'on ajoute à cela un ralentissement du commerce mondial. Comme ils ont engrangé d'excellents résultats, ils ont investi dans de nouveaux navires, ils doivent faire face à une concurrence des autres navires, qui, eux aussi, mettent plus de bateaux sur l'eau. Tout cela annonce un challenge pour CMA-CGM en 2024. Mais très franchement, je les trouve incroyablement performants malgré tout, dans une excellente gestion et anticipation. Je suis sûr qu'ils vont très bien gérer. »
C’est sans doute l’Inde dont on parle peu qui va jouer un rôle important dans les années à venir. Ce géant, un pays à l’échelle d’un continent, va-t-il s’imposer sur les routes est-ouest que la Chine empreinte moins du fait du protectionnisme américain et de la baisse de ventes de produits ménagers ou de matériel médical.
Produire avec voisins et amis
C’est pour cela que les économistes du transport ne crient pas au désastre ni à la crise. Puisque parmi les nouvelles routes commerciales prometteuses, on trouve l’axe Europe-Afrique. Sarah Guillou, dirige le Département de la Recherche Innovation et Concurrence, le DRIC : « Les flux nord-sud sont souvent de valeur inférieure, parce qu'il s'agit de transportation de marchandises ou de matières premières hors énergies. Il se trouve qu'il y a une volonté de faire du commerce entre amis, ce qui veut dire réduire les flux est-ouest. Donc, tous ces éléments-là ont conduit les entreprises, étant donné les réglementations ou l'environnement politique, à redisposer leur sourcing, c'est-à-dire là où elles s'approvisionnent. »
Enfin, le conseil à donner aux nouveaux transporteurs africains pour se lancer dans la course du transport de marchandises, c’est de ne pas voguer seul, mais de se rassembler de façon à peser sur le marché et d’avoir ainsi une chance de prospérer.
► Liens utiles :
Optim Salon DunodSat, 18 Nov 2023 - 140 - Les Européens en manque d'informations sur le transport animalier
67% des européens en manque d’information sur le transport animalier, selon le sondage Eurobaromètre de la Commission de Bruxelles qui vient de paraître. Réalisée dans les 27 pays de l'Union européenne, l’enquête prouve le soutien citoyen aux associations telles que Welfarm. Reconnue d’utilité publique, Welfarm pousse Bruxelles à réviser ses lois sur le confort animalier. Marie Waniowski de Welfarm était au mirco de Marina Mielczarek au printemps dernier. Elle dénonçait notamment les conditions de transport vers l'Afrique.
(Rediffusion du 22/04/2023)
Marina Mielczarek : Un coup de gueule vise à pousser la France et l'Union européenne à respecter les prévisions pour améliorer le transport d'animaux.
Marie Waniowski : Oui ! L'Union européenne doit limiter le transport à 8 heures de voyage pour toutes les espèces, voire à 4 heures et même interdites pour les animaux les plus fragiles.
Bœufs, chèvres, moutons... Ce sont les espèces que l'Europe exporte en majorité ?
Les volailles arrivent en tête : 1 milliard de volailles sont transportées chaque année entre voisins européens et à l'étranger. Pour les mammifères, ce sont 37 millions de mammifères par an (bœufs, moutons et chèvres.) Ensuite les poissons (comptés en kilo et non pas en nombre d'individus.)
L'Afrique, le Maghreb, le Moyen-Orient... Quels sont les pays d'exportation ?
L'Europe exporte vers l'Afrique, le Moyen-Orient et le Maghreb. La France commerce le plus avec l'Algérie, Israël (pour les animaux vivants.) Ensuite, en 3ᵉ position, la Chine avec l'exportation de porcs vers le territoire chinois.
Dans quel but ? Pour l'abattage ? Pour l'élevage ?
Pour l'abattage oui. Les bêtes peuvent aussi être destinées aux foires ou marchés de bestiaux vivants.
Quand vous dîtes améliorer le confort du transport, c'est en priorité la température, que ce soit dans les camions, les avions, les trains...
Et surtout les navires. Clairement, c'est le transport maritime qui est le moins encadré. C'est en mer qu'il y a le plus de besoin de réformes. Le transport n'y est pas du tout assuré. Un exemple, il n'y a pas de vétérinaire à bord. Pas de caméra non plus, on ne sait pas ce qui se passe à bord.
En 2023, c'est un comble de ne pas avoir de vétérinaire à bord des navires qui transportent des animaux vivants...
Parfaitement ! De plus, ce transport animalier qui n'a pas été régulé depuis 20 ans a de grandes lacunes ! Le transport maritime est incapable d'organiser ses propres dispositions. Peu de contrôles, pas de formations suffisantes et pas de sanctions significatives en cas de fraude ou de non-respect des normes...
Vous dénoncez les blessures et notamment la faim et la soif dans les transports d'animaux. Les bêtes étouffent tellement elles sont entassées. La France est-elle concernée ?
Bien-sûr. L'une des dispositions aujourd'hui demande aux transporteurs de faire reposer les animaux dans des zones réservées, des postes de contrôle pour des étapes où les bêtes peuvent s'abreuver et manger. Or, en France, ce n'est pas toujours respecté. En février dernier, en Alsace, nos enquêtrices ont été obligées d'appeler les gendarmes. Le transporteur routier a été condamné. Les veaux transportés étaient assoiffés et souffrants, ils n'avaient pas eu à boire ni de nourriture suffisante.
Comment expliquez-vous les réticences de pays comme la France, le Portugal ou la Lituanie à adopter de nouvelles normes ?
Ces pays se contenteraient d'un statu quo pour ne pas dépenser d'argent. Ne pas équiper les véhicules ou limiter les nombres de bêtes par chargement a un coût. Cela les arrangerait de ne rien changer.
Certains députés européens sont favorables à une alternative. Exporter le plus possible de carcasses ou de viande d'animaux abattus (sur le continent européen) pour remplacer le transport d'animaux vivants envoyés pour être abattus dans les pays de destination.
C'est effectivement ce que nous demandons. D'autant plus que Welfarm dispose d'une étude roumaine qui a montré qu'un tel dispositif pourrait être rentable avec des créations d'emplois en Europe et à l'étranger.
►Liens utiles : https://welfarm.fr/
https://transportsdelahonte.fr/
Sat, 11 Nov 2023 - 139 - Le Panama Blanc, l'enjeu polaire
On l'appelle le Panama Blanc, en hommage au canal de transport de marchandises du Panama en Amérique Centrale. Ce passage polaire du Grand Nord s'invite cette semaine à Paris au sommet des Pôles. Baptisé One Planet Polar Summit, du 8 au 10 novembre 2023, c'est une première mondiale. Pour la première fois, les experts de la fonte des glaces s'adresseront directement aux chefs d'État réunis au Forum sur la paix.
De loin, ça semble si facile ! Puisque l'atmosphère se réchauffe, que la banquise dégèle, les bateaux vont pouvoir naviguer dans la glace fondue. Pour la Russie, cela signifie 30% de trajets en moins. Plus besoin de contourner le Japon vers le sud pour transporter ces marchandises vers l'Europe, l'Amérique ou l'Afrique. Sur le papier, d'accord, sauf qu'on oublie deux choses : le froid et l'humidité. Il faut équiper les conteneurs contre les risques de moisissure. D'autre part, même l'hiver, il reste des plaques de glace.
Vitesse ralentie et moisissures à bord
C'est bien pour cela que la Russie, le principal responsable des côtes dans la région, oblige la présence de bateaux d'escorte, des brise-glaces en pas de problème. « La Russie a instauré une réglementation très stricte de cette route qui longe son littoral, où il faut d'ores et déjà demander une autorisation, avec l'obligation d'embarquer un pilote de glace pour conseiller le commandant du navire, mais également l'escorte d'un brise-glace dans les zones traversées par de la banquise,explique Hervé Baudu, de l'École nationale supérieure maritime. Ce qui fait que ce passage devient un passage contraignant et payant, tout comme l'est le canal de Suez. Et c'est dans cette perspective que la Russie compte mettre en place un projet de brise-glace qui transporterait des conteneurs et nécessitera de les conditionner à des températures dites maîtrisées. Comme pour les médicaments, les produits alimentaires, les produits cosmétiques ou également les produits chimiques, que ça soit en vrac ou en liquide. »
À lire aussiNorvège: dans le Grand Nord, les Russes ne font peur à personne
Parmi les pays les plus investis par ces nouvelles routes du Grand Nord, on trouve la Chine et les Émirats. Les Émirats arabes unis, qui viennent d'ailleurs de partager avec la Russie le lancement d'une nouvelle grande entreprise de transport de conteneurs au Grand Nord. Quant à la Chine, elle inclut ses nouveaux trajets maritimes dans son projet de transport mondialisé appelé les Routes de la soie.
Attention, pollution
Alors attention, avertit Anne Choquet, l'une des plus grandes expertes internationales des pôles. Au sommet, qui se tient à Paris, elle veut s'adresser aux gouvernements du monde entier. Sa théorie ? Prévenir dès maintenant les risques encourus par un trop grand trafic dans le Grand Nord. Le pétrole, par exemple. En cas d'accident : la pollution, les marées noires.
« La Chine communique beaucoup sur cette volonté d'emprunter ces routes-là. Aussi les entreprises, les opérateurs touristiques. Les risques sont réels non seulement pour la sécurité humaine, mais également pour la protection de l'environnement. » C'est justement la raison de la création de ce One Planet Polar Summit, le premier sommet international consacré au pôle à Paris.
À écouter aussiArctique: la conquête du Grand Nord
Sat, 04 Nov 2023 - 138 - Bon anniversaire Lonely Planet !
Peut-être avez-vous, vous aussi cinquante ans de voyage sur vos étagères ? Lonely Planet les célèbres guides touristiques ont 50 ans ! Un demi-siècle de conseils dans tous les pays du monde. Pour fêter l'événement, RFI vous fait partager les nouvelles demandes des passagers avec Dominique Bovet, le directeur France des Guides Lonely Planet.
RFI : Tout d'abord joyeux anniversaire ! La tendance 2023 est donc à la préservation de la planète ?
Dominique Bovet : Oui, nous venons d'ailleurs d'éditer notre dernier guide : voyages zéro carbone ou presque. L'une de nos auteurs est allée jusqu'en Suède en train. Cela lui a pris 24 h avec des conseils pour les voyageurs qui voudraient faire le même trajet, tout à fait dans l'esprit du guide spécial de Lonely Planet.
RFI : Vous êtes aux premières loges pour observer les nouvelles demandes des voyageurs. Vous dîtes que le train est devenu le premier moyen de transport en Europe, mieux que l'avion ?
D.B : Oui absolument ! Les voyageurs demandent toujours plus de trains pour traverser l'Europe. Cela fait suite à la remise en cause de l'explosion des trajets en avions low cost, peu coûteux mais qui se sont avérés très polluants.
RFI : Côté coulisses, en préparation, quels nouveaux guides Lonely Planet?
D.B : La France sans voiture, est le titre de notre dernier guide. Il y a des idées, une fois descendu du train, pour vous transporter à pied, à vélo... Nous avons la chance en France d'avoir un maillage ferroviaire assez fourni pour pouvoir faire ce genre de trajets.
RFI : Des thèmes réservés à d'autres pays, le Guide du voyage en voiture électrique
D.B : Oui ! Nous avons jugé que pour la France, le réseau de bornes de chargement n'était pas encore assez fourni. Mais ce guide existe pour l'Amérique du Nord, les USA et le Canada et aussi pour certains pays de continent européen.
RFI : En Afrique ou en Asie, le transport a connu une révolution avec les connexions qui permettent de commander son taxi ou son 2 roues sur son téléphone. Comment vous y êtes-vous adapté ?
D.B : C'est une transformation complète effectivement ! Pour donner les meilleures pistes à nos lecteurs, nous engageons des rédacteurs locaux qui habitent le pays, mais aussi en parallèle, des auteurs qui partent d'Europe et qui traversent les pays en Afrique ou en Asie grâce à ces nouveaux moyens de se déplacer.
RFI : Une bonne façon de voir les difficultés rencontrées sur le terrain !
D.B : Exactement ! Surtout de faire partager ces difficultés et donner des conseils pour les contourner ; les guides Lonely Planetsont faits pour donner les meilleures clés aux voyageurs.
RFI : Un trajet qui vous plait particulièrement ?
D.B : Récemment, l'une de nos auteurs en Afrique a traversé en train la Tanzanie et le Malawi et c'est une expérience magnifique.
RFI : L'un de vos plaisirs personnels, voyager au Japon...
D.B :Parfaitement, j'aime les trains japonais. Des trains qui ne sont jamais en retard. Dans les trains et les gares au Japon, vous trouvez beaucoup de services de restauration. Vous y mangez une cuisine d'une incroyable qualité.
Sat, 28 Oct 2023
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