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Livre international

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Tous les samedis, un journaliste de la rédaction rencontre un auteur de livre consacré à l’actualité internationale. L’occasion d’approfondir un sujet précis qui fait -ou non- la Une de l’actualité internationale.

165 - Michaël Levystone: «L'Asie centrale est devenue une plaque tournante des échanges est-ouest»
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  • 165 - Michaël Levystone: «L'Asie centrale est devenue une plaque tournante des échanges est-ouest»

    L'Asie centrale n'est plus invisible sur la scène internationale, en particulier depuis le retour des talibans au pouvoir en Afghanistan et encore davantage depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine. Les cinq pays centrasiatiques, Kazakhstan, Ouzbékistan, Kirghizstan, Tadjikistan et le plus fermé, le Turkménistan, sont l'objet des convoitises de toutes les grandes puissances, Russie et Chine en tête, mais aussi Iran et États-Unis. En quête d'uranium et d'hydrocarbures, la France d'Emmanuel Macron a également accéléré ses relations avec ces ex-républiques soviétiques. C'est ce tableau global et rare que dresse que l'expert indépendant Michaël Levystone dresse dans son ouvrage Asie centrale, le réveil, paru en mars dernier chez Armand Colin.

    Sat, 27 Apr 2024
  • 164 - «L’entretien d’embauche au KGB», par Iegor Gran

    L’entretien d’embauche au KGB est le titre du dernier ouvrage de Iegor Gran. Au cours de recherches qu’il a menées pour écrire un livre où il raconte l’arrestation de son père, l’écrivain et dissident soviétique Andrei Siniavski tombe sur un document rare, un manuel de recrutement des agents du renseignement étrangers. Il a décidé de le traduire, tout en y ajoutant du contexte et des commentaires personnels.

    Sat, 20 Apr 2024
  • 163 - Guillaume Delacroix: «L’Inde de Modi est en train de quitter le camp des démocraties»

    En Inde, des élections législatives importantes, vues comme un scrutin XXL, vont se dérouler du 19 avril au 4 juin. Près d’un milliard d’Indiens sont invités à glisser dans les urnes leurs bulletins indiquant leurs choix. Le Premier ministre sortant Narendra Modi et sa formation, le Bharatiya Janata Party (BJP), au pouvoir depuis 10 ans, sont les principaux favoris.

    Qui est Narendra Modi ? Fossoyeur de la démocratie indienne, comme le disent ses détracteurs, ou grand modernisateur, si l'on croit ses partisans ? Réponses dans Dans la tête de Narendra Modi, ouvrage entre biographie et analyse que consacrent au Premier ministre indien deux journalistes du Monde.

    En quelque 270 pages, le livre brosse le portrait de ce véritable animal politique qu'on connaît mal en Occident. Mêlant récit et analyse, les auteurs racontent son parcours personnel, dressent le bilan de son action politique et s'attachent à pointer du doigt, derrière ses bravades sur l'Inde superpuissance en devenir, le vrai dessein idéologique de Modi visant à asseoir la suprématie des hindous et à perpétuer la domination des hautes castes dans la société indienne. Rencontre avec le co-auteur Guillaume Delacroix.

    RFI : Une étude psychologique ? Une biographie ? Comment peut-on qualifier votre livre, Guillaume Delacroix ?

    Guillaume Delacroix : C'est un livre d'enquête journalistique. Nous sommes deux à l'avoir écrit : Sophie Landrin, correspondante du Monde à Delhi, et moi-même, qui ai passé huit ans en Inde, à Bombay, pour Le Monde également. Ce dont on s'était rendu compte, c'est que le personnage de Modi est porteur d'une idéologie très ancienne, qui a bientôt 100 ans. Ce qui est en train de se passer en Inde vient de très très loin. Pour nous, c'est un tournant dans le régime politique et dans la vie démocratique de ce grand pays.

    Ça vient d'une structuration de la pensée nationaliste hindoue qui remonte à 1925. Et il nous semblait intéressant de justement remonter aux racines de cette idéologie pour comprendre pourquoi Modi est arrivé au pouvoir et « pour quoi ? », en deux mots, c'est-à-dire : Quel est le dessein ? Quel objectif poursuit-il ? On a proposé nos services à Actes Sud, qui avait justement une série correspondant exactement à cette approche, qui s'appelait Dans la tête de…. Actes Sud avait déjà publié un certain nombre deDans la tête de… consacrés aux dirigeants politiques mondiaux et il manquait Narendra Modi sur l'étagère. Dans les librairies en Europe, il y a extrêmement peu de livres sur l'Inde et encore moins sur Narendra Modi, presque rien. Donc, notre livre est venu combler en quelque sorte un vide.

    Votre essai s'ouvre sur l'anecdote de la pose de la première pierre du temple d'Ayodhya. Qu'est-ce qu'elle symbolise, cette anecdote ?

    Ce temple d'Ayodhya, en fait, tout passe par lui. C'est un instrument politique. Ce temple a été construit sur les ruines d'une mosquée, elle-même démolie par des fanatiques en 1992 sous la baguette de Narendra Modi qui était, à l'époque, un jeune cacique de son parti. Il avait organisé avec le président du parti de l'époque cette démolition. C'est l'achèvement du rêve dominateur de l'hindouisme. C'était l'une des trois priorités que s'était fixées la mouvance nationaliste hindoue il y a un siècle, il y a même plus d'un siècle, à savoir : asseoir la suprématie de la majorité hindoue sur le reste de la population, les musulmans et les chrétiens.

    On connaît mal en Occident Narendra Modi. Qui est-il ? D'où vient-il ? Comment est-il devenu Premier ministre de l'Inde ?

    Il tranche vraiment avec ses prédécesseurs parce que son parcours personnel est atypique. Il n'est pas lettré, il n'est pas éduqué, il n'a pas fait d'études comme beaucoup de Premiers ministres indiens avant lui. On pense tous à Nehru ou à Indira Gandhi, mais pas seulement. Son dernier prédécesseur, du parti du Congrès, Manmohan Singh, était un grand économiste. Vajpayee qui, lui, était du parti de Modi et qui a occupé le poste de Premier ministre il y a une vingtaine d'années, était un brahmane lettré. On pense que Narendra Modi n'a même pas le bac… Enfin, il y a un flou artistique qui entoure tout cela. Une légende s'est construite autour de l'homme, le self-made man, l'autodidacte…

    Ce qui est certain, c'est que Narendra Modi est un apparatchik. Il a été formé dès son plus jeune âge, dès l'âge de huit ans, dans la nébuleuse nationaliste hindoue, incarnée par une organisation paramilitaire, l'Association des volontaires de la nation (le RSS). Il a gravi les échelons progressivement au sein de cette organisation et a été porté au pouvoir sans être candidat à des élections. En 2001, ses supérieurs l'ont nommé à la tête de l'État du Gujarat, dont il est originaire, qui se trouve être aussi l'État natal du Mahatma Gandhi. C'est seulement en 2002 qu'il a été élu par un électorat majoritairement hindou. Il est populaire au Gujarat, sans doute parce qu'il avait « laissé faire » – c'est l'expression usitée en Inde – des pogroms anti-musulmans qui ont marqué l'histoire de l'Inde contemporaine. Les pogroms ont lancé en quelque sorte la carrière politique de Narendra Modi !

    Vous racontez dans votre livre – et c'est passionnant – comment, malgré sa contribution à la cause du nationalisme hindou, il n'a pas été le premier choix des hiérarques de son organisation lorsqu'il a fallu choisir une tête de liste « premier ministrable » avant les élections législatives de 2014…

    Narendra Modi dérangeait en fait au sein de sa propre famille politique parce qu'il était atypique, et surtout parce qu'il ne venait pas des hautes castes. L'Inde est connue pour son système de castes très rigide, qui divise la société en quelque 25 000 castes. Le mouvement hindouiste est dirigé par des hommes de haute caste et pour ces dirigeants, Modi, qui est issu d'une classe sociale modeste, ne pouvait pas être leur candidat à la primature. Finalement, parce que Modi est un homme talentueux, charismatique, qui sait manier la carotte et le bâton, il a réussi à emporter le choix des autorités du RSS comme candidat de son parti pour le poste de Premier ministre. C'était finalement un bon choix puisqu'il a gagné l'élection.

    Il s'est aussi révélé être un bon soldat, qui porte avec conviction et fidélité le message de son mouvement, l'hindutva. Or, qu'est-ce que l'hindutva ?

    Tout cela vient de loin. Narendra Modi est l'aboutissement du cheminement lent, progressif de l'idée du suprémacisme hindou, qui débouche aujourd'hui sur une polarisation extrême. L'hindutva, c'est l'idée que la majorité a des droits supérieurs aux minorités, et c'est pour cela qu'on adopte des lois stigmatisantes et qu'on établit une forme d'apartheid rampant. C'est un peu ce qui est en train de se passer aujourd'hui. On assiste à une institutionnalisation de la ségrégation entre les hindous d'une part, et d'autre part, ceux qui appartiennent à des religions différentes, celles des « envahisseurs » en fait. Modi parle beaucoup d'esclavage, c'est-à-dire en gros 1 000 ans d'occupation musulmane, puis 200 ans d'occupation britannique. Cela se traduit aujourd'hui par des mosquées que l'on détruit, comme cela s'est passé à Ayodhya avec la destruction de la mosquée Babri en 1992.

    L'hindutva, c'est ça, c'est dominer et faire croire à une masse solidaire d'hindous que leur religion est supérieure aux autres religions. C'est bien sûr une fiction, mais pendant ce temps-là, alors qu'on unifie les hindous contre les musulmans et les chrétiens, on ne parle pas des fractures qui divisent la société indienne, où le pouvoir est entre les mains de la plus haute caste, les brahmanes. Obnubilée par la question musulmane, la population hindoue vit dans l'ignorance de cette situation.

    Si je vous comprends bien, Guillaume Delacroix, le véritable objectif de Narendra Modi n'est pas la marginalisation des minorités, mais la perpétuation de la hiérarchie des castes. C'est ça, le dessein caché ?

    C'est vraiment le cœur de notre livre avec Sophie Landrin. L'objectif de ce gouvernement n'est pas tant l'hindouisme que le castéisme, c'est-à-dire la domination de la société indienne avec le maintien du pouvoir entre les mains d'une oligarchie de hautes castes. Alors après, on peut gloser sur la définition de ce qu'est l'Inde aujourd'hui. On l'appelle encore « la plus grande démocratie du monde ». Nous, on pense que ce n'est plus le cas. Elle a peut-être encore quelques traits de démocratie parce qu'il y a des élections, et même des alternances, sur le plan de la gouvernance régionale. Mais force est de constater que l'État de droit en Inde est battu en brèche tous les jours. Le pouvoir aujourd'hui est maintenant entre les mains d'une oligarchie, avec un mélange de genres absolument inédit entre le politique et le religieux.

    Narendra Modi se pose en grand prêtre, en gourou, quand il préside à des cérémonies, comme il l'a fait à Ayodhya où il a présidé, fin janvier, l'inauguration du temple bâti sur les ruines de la mosquée abattue. Ce mélange du politique et religieux est totalement en décalage avec le rôle imputé au Premier ministre de l'Inde dans la Constitution, qui est égalitaire et séculariste. Selon la Constitution de 1950 toujours en vigueur, l'Inde doit accueillir toutes les religions et ne doit en privilégier aucune.

    C'est en fait le contraire qui se passe depuis dix ans, en toute impunité, en attendant le changement de la Constitution...

    C'est un peu, si vous voulez, le souhait des nationalistes hindous et des plus radicaux de cette frange politique. Elle veut prendre sa revanche sur la partition de 1947, lorsque l'Inde est devenue indépendante. Le pays a été divisé en deux, avec d'un côté le Pakistan qui s'est défini comme une république islamique, et de l'autre, l'Inde qui a souhaité, sous la férule de Gandhi et de Nehru, demeurer laïque. Aujourd'hui, la droite hindouiste veut revenir là-dessus et réclame que, puisque les musulmans ont eu leur État avec le Pakistan, l'Inde doit être un État hindou. Nous expliquons dans notre livre que ce débat va au-delà du religieux pour rappeler que, pour une frange de la droite hindouiste, l'hindouisme est dans l'ADN, dans le sang des gens.

    L'hindouisation du pays semble être allée de pair avec une véritable dérive autoritaire. Dressant le bilan des dix années de Narendra Modi à la tête du pays, vous évoquez dans votre livre un « gouvernement par la peur » qui touche les minorités, mais aussi les médias, les intellectuels, les universitaires, les étudiants. On assiste à un sérieux rétrécissement des libertés. Comment est-on passé de la démocratie bureaucratique et chaotique de l'Inde d'antan à cet État quasi orwellien ?

    Il ne faut pas penser que tout s'est fait en un jour et que, lorsque Narendra Modi a pris les rênes de l'Inde en mai 2014, tout a basculé. Tout cela était en germe en fait dans l'histoire politique de l'Inde. C'est simplement qu'avec le BJP au pouvoir, tout a été démultiplié. Le braconnage des élus, par exemple, existait avant, mais le phénomène a été démultiplié par 100, peut-être par 1 000. L'Inde a toujours été un pays inégalitaire. La peur du plus fort, du plus puissant touche aujourd'hui la gouvernance, même les gens à la tête du pays. Les témoignages que nous avons recueillis auprès des personnes participant aux réunions décisionnaires dans le bureau du Premier ministre nous ont laissés entendre que tout le monde a le doigt sur la couture du pantalon, si je puis m'exprimer ainsi, parce qu'ils ont tous peur. D'ailleurs, c'est dans le bureau du Premier ministre que toutes les décisions sont prises, car il y a aujourd'hui une concentration absolument inédite du pouvoir entre les mains d'un seul homme. Les ministres sont tous des fantoches et ils ont tous peur de parler, de déplaire au chef. Et cette peur se dissémine, se répand à travers le pays.

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    Les gens ont peur parce que le Parlement a voté de nouvelles lois liberticides qui réduisent la liberté d'expression des citoyens. Le gouvernement a autorisé les agences au sein des services secrets, tout comme le fisc, à poursuivre systématiquement les opposants politiques et la société civile. On a fait fermer 20 000 ONG sous prétexte qu'elles touchaient des financements venant de l'étranger ou bien d'être des agents de l'étranger, et donc de promouvoir la sédition et la désagrégation de l'Inde. On a politisé la justice et on a fait peur aux juges en les nommant dans des bleds éloignés s'ils passent des jugements considérés comme étant critiques du gouvernement. Encore tout récemment, deux étudiants ont été suspendus d'une grande université parce qu'ils avaient osé lancer un débat sur le temple d'Ayodhya dans l'amphithéâtre. Les Indiens vivent aujourd'hui dans un régime de peur généralisée, dans lequel les victimes sont transformées en coupables et les coupables en innocents.  

    La presse aussi a fait les frais de ce raidissement du pouvoir qui n'a pas épargné la presse internationale, comme en témoigne l'affaire de la journaliste française Vanessa Dougnac, obligée de quitter l'Inde en février dernier, après avoir été en poste dans ce pays depuis 20 ans. Diriez-vous que cette affaire est révélatrice d'un changement de régime en Inde ?

    Pour les journalistes exerçant leur métier en Inde, cette affaire a été un électrochoc. C'est la première fois qu'un correspondant étranger est chassé de ce pays. Vanessa Dougnac était correspondante de l'hebdomadaire Le Point, puis du quotidien La Croix. Elle vivait depuis 23 ans en Inde et s'était mariée avec un Indien, avec qui elle a eu un enfant. Les autorités indiennes lui ont reproché d'avoir écrit des reportages « malveillants » et « biaisés » sur l'Inde, alors qu'elle était considérée par ses confrères comme l'une des meilleures spécialistes du pays dans la presse française. Cette affaire est préoccupante, car elle révèle en effet le rétrécissement de la liberté de la presse en Inde.

    Éclatant dans la foulée d'autres affaires de censure visant la presse indienne et la presse étrangère, cette affaire a valu à l'Inde d'avoir perdu 21 places dans le classement mondial sur la liberté de la presse, où elle se situe, derrière l'Afghanistan, au 161e rang de l'index qui compte 180 pays. Pour ma co-autrice Sophie Landrin et moi, l'affaire de la journaliste française chassée d'Inde était le signe que ce pays est en train de quitter le camp des démocraties pour basculer dans celui des théocraties. La mutation de la démocratie indienne versant dans la dictature est le fil conducteur de notre livre.

    La démocratie indienne versant dans la dictature, telle n'est apparemment pas l'opinion des partenaires de l'Inde, qui mettent en avant son statut démocratique et continuent de la célébrer et de dialoguer avec elle. Quels sont les ressorts du succès international de Narendra Modi, celui que vous appelez le « Erdogan hindou » ?

    Oui, nous le comparons au président turc parce qu'il y a beaucoup de similarités entre la trajectoire politique de ces deux leaders. Ils sont à la tête de deux États au départ laïcs, mais issus de partis religieux. Ces deux hommes forts sont en train de conduire leur pays vers le fondamentalisme religieux. Or, si les relations entre Erdogan et ses partenaires occidentaux se sont compliquées, Modi continue d'être reçu avec tous les égards dans les capitales occidentales. C'est sans doute parce que Narendra Modi a eu la chance d'arriver au moment où l'Occident avait besoin d'un contrepoids face à l'expansionnisme chinois dans ce qu'on appelle en géopolitique la « zone indo-pacifique ». Les Occidentaux ont trouvé dans l'Inde, pays aujourd'hui puissamment armé, le candidat idéal pour contenir les routes de la soie de Xi Jinping. Cela s'est traduit par le renforcement des partenariats stratégiques entre l'Inde et ses partenaires occidentaux.

    Les honneurs pleuvent sur le leader indien. En France, il a été reçu, le 14 juillet 2023, sur les Champs-Élysées. Invité d'honneur, il a reçu des mains du président français la grand-croix de la Légion d'honneur. Avec ma co-autrice, on voit dans cette démarche un énorme paradoxe et on s'est demandé : s'il est vrai qu'on n'est pas obligé d'être regardant pour faire du commerce avec un pays, est-ce que la patrie des droits de l'homme est obligée de récompenser un homme qui coupe les libertés de ses concitoyens, et cela précisément le jour où elle célèbre à travers sa Révolution l'arrivée des libertés ? Les symboles ont leur importance.

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    Nous sommes à quelques jours des législatives indiennes. Narendra Modi demeure très populaire dans son pays. Selon les sondages, son parti le BJP pourrait remporter les élections avec une majorité absolue. Croyez-vous que les jeux soient d'ores et déjà faits ?

    Pas nécessairement. D'abord, je pense qu'en politique, les jeux ne sont jamais faits d'avance et il peut toujours se passer quelque chose. Il peut y avoir des surprises de dernière minute, un coup de théâtre qui fasse que finalement, les pronostics soient déjoués. Pour l'instant, en effet, Narendra Modi apparaît comme archi favori, parce qu'il dispose d'une machine électorale absolument énorme : de l'argent, des outils de propagande phénoménaux qui sont dus notamment au fait qu'il est au pouvoir depuis 10 ans et qu'il se présente pour la troisième fois successive au scrutin des électeurs. Il domine la scène politique, car en face de lui, l'opposition est complètement déstructurée, atomisée.

    Finalement, le sortant a un désert en face de lui, ce qui pourrait lui être favorable. Mais on n'est pas à abri d'un grain de sable. Tout récemment, la Cour suprême a, par exemple, annulé le dispositif de financement de la vie politique qui profitait très largement, très majoritairement au parti au pouvoir, le BJP de Narendra Modi. Cette décision remet un peu en cause un certain nombre de choses, car on s'est aperçu que le parti de Modi est financé par de grands milliardaires et de grandes entreprises. Ces découvertes peuvent intervenir dans les calculs des électeurs. Je resterai donc encore prudent.

    Dans la tête de Narendra Modi, par Sophie Landrin et Guillaume Delacroix. Solin/Actes Sud, 271 pages, 21 euros.

    Sat, 13 Apr 2024
  • 162 - Nicolas Tenzer: «L'envoi de troupes occidentales au sol doit être une hypothèse possible»

    Les autorités russes ont fini par reconnaitre que ce sont des combattants islamistes qui avaient conduit l'attaque de vendredi dernier dans une salle de spectacle à Moscou. Mais les enquêteurs russes n'en démordent pas : c'est l'Ukraine qui est responsable et évoquent des « liens avec les nationalistes ukrainiens » alors que la guerre déclenchée par la Russie contre l'Ukraine est dans sa troisième année. Dans son livre Notre guerre. Le crime et l'oubli : pour une pensée stratégique publié aux Éditions de l’Observatoire, Nicolas Tenzer appelle l’Occident à prendre la mesure de « la guerre totale » que Vladimir Poutine livre à l’Ukraine et aux démocraties. L'expert des questions stratégiques, qui rentre tout juste de Kiev, salue l'intervention d'Emmanuel Macron, évoquant la possibilité d'une intervention de troupes occidentales au sol.

    À écouter aussiLa revue de presse internationale : urgence pour l’Ukraine

    Sat, 30 Mar 2024
  • 161 - «Harlem, un quartier devenu chic qui instrumentalise le patrimoine historique du mythique ghetto noir»

    Harlem, capitale de l’Amérique noire, ne sera bientôt plus un quartier noir. Dans Harlem, une histoire de la gentrification  publié aux éditions de la Maison des sciences de l’homme, Charlotte Recoquillon retrace un siècle d’histoire de ce quartier mythique de New York pour comprendre comment des politiques publiques dans le secteur immobilier et des initiatives privées ont conduit les plus pauvres à quitter le quartier au profit de classes sociales supérieures. Entretien avec Charlotte Recoquillon, géographe, docteure de l’institut français de géopolitique et spécialiste des États-Unis.

    Sat, 23 Mar 2024
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